Une communauté enfantine fondée sur l’amour

 

 

Comment je suis devenue « maman » de soixante orphelins à Brazzaville

 

Sœur Marie-Thérèse nous raconte comment son amour des enfants l’a conduite à tout quitter pour recueillir des orphelins et enfants des rues à Brazzaville. Au sein de la maison Notre Dame de Nazareth, tous se voient offrir une chance de vivre dans une famille d’adoption régie par l’amour. Sœur Marie-Thérèse nous présente cette grande aventure dans un « talk » diffusée par TEDx Paris (1) : « Comment je suis devenue « maman » de 60 orphelins de Brazzaville ».

 

En effectuant une visite quotidienne en prison, Sœur Marie-Thérèse a rencontré un petit garçon de trois ans, Albert, qui y vivait avec sa maman incarcérée. Bouleversée par cet enfant, elle l’a accueilli et gardé jusqu’à la libération de sa mère. A partir de là, Marie-Thérèse nous rapporte combien elle a été poussée par une forte motivation : « Cette étincelle est devenue en moi un feu dévorant. Ce feu pousse à prendre des décisions déroutantes, voire scandaleuses pour l’entourage, une folie pour les sages. Ce feu est impérieux. Il bannit la peur… Le 5 septembre 1998, pour être plus disponible aux enfants en détresse, j’ai tout quitté. Je suis partie de ma congrégation avec une vingtaine d’enfants. Je n’avais ni maison, ni argent, ni santé. Ma seule richesse était ma confiance en Dieu ».

 

C’est une grande aventure qui commence : « Les enfants et moi, étions au même niveau. Nous sommes toujours au même niveau. Je n’ai pas la fierté, la satisfaction et l’orgueil de celui qui donne. Nous vivons de dons. Ce n’est pas toujours facile, mais qu’est-ce qu’on ne ferait pas pour donner de la joie aux enfants ! Aujourd’hui, ils sont une soixantaine, filles et garçons. Ils m’appellent maman ».

 

Cette communauté est organisée dans un esprit d’entraide et de soutien mutuel. « Le travail est le pilier de la maison et notre prière quotidienne en est le ciment ». Il y a quatre groupe de travail qui ont pour tâche : le ménage, la cuisine, la vaisselle, le soin porté aux enfants (toilette et sécurité). « A la tête de chaque groupe, il y a un aîné qui supervise le travail et me donne un compte-rendu. Tous les groupes se permutent chaque semaine de telle sorte que les responsabilités soient partagées en tenant compte des capacités de chacun. Ainsi, personne n’est laissé au bord du chemin. Chacun  a sa place et se sent valorisé ».

 

Cette grande famille est fondée sur la confiance mutuelle : « Il n’y a pas de famille s’il n’y a pas de confiance mutuelle les uns envers les autres. Pour cela, il faut que le dialogue ait une place de choix.  Dans le dialogue, la confiance prend racine. La confiance que je leur fais, peut leur permettre d’avoir confiance en eux. Je pense ainsi travailler à l’autonomie. L’entraide est une vertu cardinale de la maison. Les plus grands aident les plus petits. Ils les consolent quand ils ont des chagrins. Les bien portants aident les malades ».

 

 

Cette famille est une aventure fondée sur l’amour. « Comme toutes les familles, la  nôtre n’est pas parfaite. Il y a beaucoup de problèmes et de soucis. Notre famille est fragile, mais elle est fantastique. Elle est soudée et les aînés donnent le meilleur d’eux-mêmes dans l’adversité, dans la joie comme dans le malheur. Notre famille avance. Elle espère. Elle croit en la vie. Elle remercie. Elle dit toute sa reconnaissance à ceux qui l’aide.

Ce que j’apprend aux enfants lors de leur passage dans la famille est de bien faire ce qu’ils ont à faire et ce, jusqu’au bout, coûte que coûte.

L’amour est le socle de tout sans lequel toute entreprise est vide et stérile ».

 

J H

 

(1)            « Comment je suis devenue « maman » de soixante orphelins de Brazzaville » : un talk en vidéo sur le site de TED x Paris : http://www.tedxparis.com/comment-je-suis-devenue-maman-de-60-orphelins-de-brazzaville/

 

Sur ce blog, voir aussi : « De la décharge publique à la musique » : https://vivreetesperer.com/?p=1603

 

« Sur le chemin de l’école » : https://vivreetesperer.com/?p=1556

 

Plus généralement, sur la question de l’éducation :

« Et si nous éduquions nos enfants à la joie ? » : https://vivreetesperer.com/?p=1872

 

 

Apprendre à accompagner les malades

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Une école de vie

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Depuis quelques années, pasteur de l’Eglise réformée de Suisse romande, Jean-Claude Schwab participe à la formation d’aumôniers d’hôpitaux en République démocratique du Congo. Jean-Claude est également engagé dans le réseau « Expérience et théologie » et anime le site de cette association (1). Au cours d’un entretien, Jean-Claude Schwab a répondu à quelques-unes de nos questions sur l’accompagnement des malades.

J H

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Qu’est-ce qui t’a amené à participer à cette formation d’aumôniers d’hôpitaux en Afrique ? Comment se déroule cette formation ? Avec quels effets ? Qu’est-ce que tu as appris pour toi-même ?

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         Le responsable des aumôneries du Congo s’est adressé à l’aumônerie du Centre hospitalier universitaire de Lausanne (CHUV) pour demander une aide de compétence. J’étais moi-même formateur et, en 2008, l’association de supervision pastorale m’a mandaté pour cette mission. Moi-même, j’avais été aumônier de l’Université de Kinshasa dans les années 1970.

         Cette formation d’aumôniers se fait sous forme de cours en interne dans un hôpital, avec une partie de pratique d’entretiens, de visites, de rencontres avec des malades et des membres du personnel soignant. Ensuite, on retravaille sur ces entretiens (verbatim). Une autre partie, c’est la connaissance de soi-même et de « soi-même en relation », non seulement à partir de l’analyse des visites, mais également à partir des relations dans le groupe.

         Quels sont les effets de cette formation ? Les pasteurs qui suivent cette formation  sont bouleversés par l’implication personnelle que cela représente. Ils voient ce qu’ils font. C’est très souvent la première fois qu’ils ont un regard extérieur, compétent et bienveillant sur eux-mêmes; en effet, ils sont eux-mêmes accompagnés par des formateurs et découvrent avec reconnaissance, par l’expérience, un type d’accompagnement qu’ils ne connaissaient pas. Ils peuvent se percevoir en vérité, dans un climat de pleine acceptation;  ce qui les régénère et leur ouvrent une nouvelle potentialité. L’effet, c’est une ouverture à leurs propres ressources. Ils se découvrent comme ayant plus de possibilités qu’ils ne pensaient. C’est justement ce qu’ils vont pouvoir offrir aux malades: cet accès à leurs propres ressources et à celles que Dieu leur donne.

         J’ai appris moi-même à découvrir et recevoir des ressources inattendues.  J’ai pu me mettre à l’école des personnes d’autres cultures et d’horizons différents. J’ai aussi observé et expérimenté les capacités de guérison qu’il y a dans une écoute authentique. Lorsqu’une personne se sent dans une relation de confiance, elle peut accéder à ses propres douleurs et questionnements, cela la libère pour s’ouvrir à d’autres possibilités d’évolution et d’espérance.

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A partir de cette expérience, comment perçois-tu, dans leur ensemble, les besoins des personnes malades ?

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         Les besoins réels ne sont pas en général ceux qui apparaissent en premier, les plus visibles. Il faut aider les malades à accéder à la conscience de leurs besoins les plus profonds. Ce besoin le plus réel, c’est peut-être de rencontrer quelqu’un qui atteste par son attitude, par sa présence, qu’ils ne sont pas abandonnés, quelqu’un qui entre dans la compréhension de ce qu’ils vivent douloureusement, sans désespérer, ni banaliser. J’évoque ici des besoins qui sont de type relationnel, ceux auxquels on peut répondre par sa qualité de présence. C’est dans ce contexte que l’accompagnement trouve son sens, sa place.

         Comment cet accompagnement peut-il se réaliser ? La base, c’est la sollicitude qui est une des capacités essentielles de chaque humain. Et cela entre dans les pratiques qui sont communément inscrites sous le vocable récent de « care ». La sollicitude, c’est la chaleur humaine qui permet de se relier, d’être reconnu et de répondre à des besoins existentiels.

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Comment les chrétiens participent-ils à cette approche ?

 

         Les chrétiens peuvent accompagner comme tous les êtres humains. Ils ont les mêmes capacités que les autres et rencontrent les mêmes risques, ce qui implique qu’ils se forment au moins autant que les autres à cette pratique. Ceci dit, ils sont appelés à transcrire dans la relation et de façon créative l’amour et l’espérance qui les habitent. Mais, en plus de transcrire, ils sont appelés à voir l’amour et l’espérance surgir au cœur de la relation.

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Jésus nous dit : « J’étais malade et  vous avez pris soin de moi » (Matthieu 25.36).  Comment entends-tu cette parole et sa mise en œuvre ?

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         Cette parole oriente l’accompagnant vers une quête. Elle lui donne le statut d’un chercheur qui s’attend à reconnaître le visage du Christ. Je suis dans une relation fraternelle et pas dans une relation d’aide hiérarchisée. Cela m’ouvre à une attitude de serviteur plutôt que de bienfaiteur. Cette perspective que l’autre est porteur du visage du Christ, nourrit ma relation avec lui. Ainsi, je m’approche des malades comme d’un mystère précieux, saint. La parole de Jésus, au sujet de cette pratique : « Toutes les fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Matthieu 25.40), nourrit la motivation du visiteur croyant lorsqu’il visite des malades. Cette perspective nous ouvre l’accès à voir quiconque comme lieu de révélation (« le sacrement de l’autre »).

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Dans l’Evangile, Jésus guérit des malades. L’œuvre de guérison divine se poursuit aujourd’hui. Comment l’accompagnement chrétien participe-t-il à cette œuvre ?

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         Le visiteur chrétien se reconnaît comme un parmi d’autres de ceux qui contribuent à la guérison. Tout progrès vers la guérison peut être perçu comme une action de Dieu. Ceci dit, sa confiance en Dieu le soutient dans son approche du malade et peut fortifier celui-ci et lui permettre de développer sa propre confiance. Il est ouvert au surgissement de vie au cours de l’accompagnement. Par ailleurs, la guérison s’inscrit dans un processus qui trouve sa pleine réalisation dans la résurrection.

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Jésus veut nous communiquer la paix. Comment l’accompagnement y contribue-t-il ?

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         Lorsque Jésus parle de paix, il évoque le « shalom » qui est un terme hébreu beaucoup plus large, beaucoup plus inclusif que le mot : paix. Le « shalom », c’est l’accomplissement du projet divin de restauration de toutes choses. Toute bénédiction non seulement proclame quelque chose, mais aussi communique quelque chose de ce shalom. Un geste de paix, une parole, par exemple, sont porteurs de cette réalité. On peut en observer des effets, que ce soit au niveau immédiat d’un ressenti ou une influence plus diffuse ou à long terme : un apaisement, un soulagement, une réconciliation ou une guérison physique.

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Quel message face au poids des souffrances et des limites ?

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         Pour moi, je ne mets pas l’accent sur le message, mais sur l’attitude qui, elle-même, devient message. Cela me libère de la préoccupation de savoir quoi dire ! Le message ne peut être que spécifique à la situation présente, il surgit au cœur de la rencontre.

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Comment l’accompagnement intervient-il face à la menace de la mort ?

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         C’est ici que le besoin d’expérience et de formation se fait le plus sentir. Les mourants sont nos maîtres parce qu’ils nous précèdent dans l’expérience et c’est d’eux que nous avons à apprendre. Une telle formation implique que nous soyons nous-mêmes confrontés à nos propres limites et à notre mortalité afin qu’on puisse entrer avec l’autre dans sa condition, sans désespérer. Accepter sa propre impuissance qui nous permet de communier avec l’autre, redécouvrir la face d’une simple présence à l’autre qui reflète la présence du Christ : nous sommes nous-même soutenus dans ce processus par notre perspective de la résurrection.

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Dans quelle mesure les accompagnants ont-ils besoin de formation ?

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         Les accompagnants ont besoin d’être eux-mêmes écoutés et accompagnés pour découvrir de l’intérieur le secret d’un tel parcours, se découvrir eux-mêmes et leurs potentialités. Ils acquièrent non seulement des compétences positives, mais découvrent aussi tous les travers dans lesquels ils peuvent tomber et comment ceux-ci peuvent être transformés en ressources.

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Dans quelle mesure l’expérience vécue par des accompagnants professionnalisés peut-elle se manifester dans la vie de tous les jours ?

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Une enquête faite auprès  des stagiaires congolais, une année après cette formation, a mis en évidence chez eux un émerveillement. Ils affirment que ce qu’ils ont appris dans leurs relations avec des malades s’applique dans tous les domaines de leur vie : relation avec leur conjoint, leur famille, leurs paroissiens. Leur nouvelle capacité d’écoute a transformé leurs relations. Ils ont maintenant également davantage conscience de leurs potentialités et de celles des autres. Plutôt que de se tourner vers les manques, ils s’appuient sur leurs possibilités.

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Contribution de Jean-Claude Schwab

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(1)            Jean-Claude Schwab est pasteur. Il participe activement au réseau : « expérience et théologie » et à la responsabilité du site correspondant : http://www.experience-theologie.ch/accueil/

(2)            On pourra lire sur ce blog deux autres contributions de Jean-Claude Schwab :                                                              « Accéder au fondement de son existence » : https://vivreetesperer.com/?p=1295 . « Entrer dans la bénédiction » : https://vivreetesperer.com/?p=1420 .On peut aussi découvrir sur son blog, le témoignage de son activité au Congo:  http://cpt-congo-projet.blogspot.ch/                                                                                                

                                                   

Quand un jeune africain construit, à quatorze ans, une éolienne pour apporter l’électricité dans son village

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« The boy who harnessed the wind ».

 

         Dans notre monde où violences, déchirements et souffrances ne sont que trop visibles, il y a aussi un mouvement vers la paix, la liberté, la solidarité qui conforte notre espérance. Et, en regard de tout ce qui porte atteinte à la vie, il y a une multitude de gestes et de comportements qui nous parlent de bonté, de générosité, de créativité.

Les échos qui nous en parviennent touchent notre cœur et suscitent en nous enthousiasme et émerveillement.

         Aujourd’hui, l’information circule à travers le monde et nous découvrons des merveilles sur le web. Et, ainsi, nous pouvons partager aujourd’hui l’histoire de William Kamkwanba, un jeune africain du Malawi, qui, à quatorze ans, dans un environnement particulièrement démuni, a construit par lui-même, une éolienne dans un petit village éloigné.

          Il était une fois…  un jeune garçon qui avait commencé à aller à l’école et qui, à la suite d’une grande sécheresse et famine, qui, en 2002, avait ravagé son village et ruiné sa famille, n’a pu poursuivre des études faute de pouvoir payer les droits de scolarité correspondant. A l’école, William avait commencé à aimer les sciences. Alors, désormais en dehors de toute scolarité, il s’est rendu à la bibliothèque publique d’une ville voisine pour y emprunter des livres de physique, et, tout particulièrement un livre qui va l’accompagner dans sa démarche : « Using energy ».

         A partir de cet ouvrage, mais en devant suppléer aux lacunes de celui-ci quant au comment faire, William va s’engager à 14 ans dans la construction d’une éolienne. Car, nous dit-il, dans la vidéo (1) qui raconte son histoire,  « il y assez de vent au Malawi ».  Tout seul, malgré les incompréhensions et les moqueries, à partir de matériaux issus de rebuts, il parvient à construire une éolienne rudimentaire, mais efficace. Dans ce village démuni, quelque part l’électricité apparaît. Et nous participons à la joie de William lorsqu’il parvient grâce à cette électricité à écouter de la musique reggae en provenance d’une radio du Malawi. Et, pour la ferme, il réalise une seconde éolienne permettant de pomper l’eau.

         Désormais, William n’est plus confronté aux moqueries. Et lorsqu’il va rapporter les livres empruntés à la bibliothèque, il peut répondre à la question du bibliothécaire : « Vous avez construit une éolienne en utilisant le savoir qui est dans ce livre ? Et je répondis : « oui ». L’histoire se répand dans le pays. A la fin de l’année 2006, la presse en parle. En décembre 2007,  ce jeune garçon créatif est invité pendant trois semaines aux Etats-Unis, un pays qui sait encourager les talents dans le monde. En 2009, il est invité au forum Ted. Ce témoignage est présenté sur une autre vidéo (2) et se termine par une expression de confiance : « Dieu bénit.  N’abandonnez pas ! ». William Kamkwanba va pouvoir poursuivre des études. Et grâce à lui, son village aujourd’hui dispose de l’électricité. Voilà qui change la vie de sa famille et de toutes les familles de ce village… En 2013, un livre racontant cette histoire vient d’être publié : « The boy who harnessed the wind » (Le garçon qui a dompté le vent » (3). William se consacre aujourd’hui à la construction d’éoliennes pour mettre l’électricité à la disposition de ses concitoyens, et, par là même aussi l’accès à internet.

         L’exemple de William n’est pas isolé.  On trouve sur le web des vidéos qui témoignent de la créativité d’autres jeunes africains (4). Il y a dans les pays du sud, en phase avec une capacité de communion spirituelle, un élan de vie qui se traduit de multiples façons : dans la manière dont les enfants surmontent les obstacles pour se rendre à l’école (5), dans la lecture partagée des albums et des livres (6), dans un engagement musical (7). Et, aux cotés de ces enfants, de ces jeunes, il y a des adultes qui les accompagnent, car il n’y a pas plus belle tâche.  Bien sûr, nous entendons là un appel universel et là où cela est nécessaire, dépassons les encombrements, les rigidités, les surdités. Aujourd’hui comme hier, il y a une ouverture vers l’avenir. Il était une fois…

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J H

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(1)            La vidéo sur You Tube : African genius : 14 years old self-taught engineer makes electricity for village : http://www.youtube.com/watch?v=rruNxURlWCY

(2)            William Kamkwamba. « How I harnessed the wind » (Ted talks, 2009) : http://www.youtube.com/watch?v=6QkNxt7MpWM

(3)            William Kamkwamba  présente son œuvre sur un site personnel : http://www.williamkamkwamba.com/ On trouvera sur ce site les coordonnées de son livre : The boy who harnessed the wind by William Kamkwamba and Bryan Mealer (2013).

(4)            Agé de 15 ans, un jeune de Sierra Leone, Kelvin Doe, s’est formé par lui même et est devenu un brillant inventeur, fabriquant des batteries, des générateurs et des transmetteurs à partir de rebuts et créant sa propre station de radio. Il a été invité au MIT aux Etats-Unis.. Voir la vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=XOLOLrUBRBY

(5)            Sur ce blog : présentation du film : « Sur le chemin de l’école » : https://vivreetesperer.com/?p=1556

(6)            Sur ce blog,  présentation du livre « Laissez les lire » dans lequel Geneviève Patte présente son itinéraire de bibliothécaire pour enfants, très en phase avec les expériences de lecture dans les pays d’Amérique Latine : https://vivreetesperer.com/?p=1556

(7)             Sur ce blog : « De la décharge publique à la musique » https://vivreetesperer.com/?p=1603

Sur le développement en Afrique, sur le site de Témoins, on pourra lire : Promesses d’avenir pour l’Afrique : un nouveau regard : http://www.temoins.com/societe/promesse-d-avenir-pour-l-afrique.-un-nouveau-regard.html

Aujourd’hui, nous sommes tous frères à Bamako !

La rencontre de Habib Koité et Eric Bibb dans l’album : « Brothers in Bamako ».

Bamako : une ville africaine qui, peut être, passait inaperçue. La voici aujourd’hui, en ce début de l’année 2013, au centre de l’actualité. L’attention du monde se porte sur le Mali.

Certes, depuis un an, des groupes islamistes avaient conquis une partie du pays. Le fanatisme religieux se répandait en exactions et imposait sa loi. En regard, on voit maintenant le prix de la dignité humaine, du respect de l’homme, de la liberté, de la tolérance. On saisit la valeur concrète de ce qui, dans certains contextes, peut apparaître comme des banalités, voire de grands mots. Les populations de Gao et de Tombouctou, qui ont accueilli dans la liesse les armées françaises et maliennes, ont témoigné, par leur enthousiasme, de l’importance existentielle de ces valeurs. Pour des français, cet événement évoque la mémoire de la libération vécue en 1944.

Mais, on le sait, les batailles se gagnent dans  les esprits et dans les cœurs. Comment une qualité de vie peut-elle s’exprimer, attirer, mobiliser ? Le Mali est un pays où les artistes sont nombreux et actifs. Quelques mois avant le paroxysme de la crise politique et militaire au Mali, un événement était intervenu dans le registre de la culture. C’était la production commune d’un CD par deux chanteurs- musiciens, l’un Malien, l’autre Afro-Américain. Habib Koité et Eric Bibb ont donné à cette expression, une portée symbolique en l’intitulant : « Brothers in Bamako » (1). « Frères à Bamako », ils témoignent ensemble de l’amitié, de la fraternité, de la beauté. A travers ces deux itinéraires, des courants culturels  convergent et portent du sens.  On trouvera sur internet toute l’information souhaitable concernant les chemins parcourus par Habib Koité et Eric Bibb (2). L’un et l’autre s’enracinent dans un  riche héritage culturel. L’un et l’autre ont parcouru et parcourent aujourd’hui le monde. Ainsi, « Brothers in Bamako » témoigne à la fois d’une rencontre authentique, d’une harmonie entre deux courants musicaux, mais aussi d’un véritable universalisme. Nous recevons cet universalisme comme une victoire sur le clinquant et la superficialité d’une société tournée vers le paraître et sur la barbarie engendrée par le fanatisme religieux.

 

Ainsi pouvons nous lire le descriptif de cet album : « J’ai  regardé mes parents et cela a déteint sur moi ». C’est ainsi qu’Habib Koité trace les origines de son métier mais aussi de son talent de griot du XXè siècle. Eric Bibb peut en dire autant, lui qui, non content d’avoir un père chanteur, est le filleul de Paul Robeson. Habib est héritier d’un  savoir ancestral utilisé au profit d’une chanson qui le place parmi les voix les plus influentes de l’Afrique contemporaine. Eric s’est imposé dans la nouvelle génération des bluesmen sans pour autant renier les héritages du folk song et du gospel. Quoi de plus naturel alors pour ce Malien et cet Afro-Américain que de faire rimer leurs guitares et leurs voix pour partir dans un blues trans-Atlantique ? Deux chanteurs populaire, deux chanteurs enracinés dans une tradition ancienne et ce qu’elle transmet : un  savoir-faire, un répertoire exemplaire, une manière d’utiliser la chanson pour jouer un rôle citoyen. Les deux ont acquis, humblement, le sens d’une chanson qui peut imprégner la société ».

Dans ce descriptif, Etienne Bours nous raconte également comment Habib et Eric se sont rencontré voici une dizaine d’années. ils ont sympathisé. Il sont restés en relation . L’amitié était là. Peu à peu, se revoir devint d’abord un  rêve, puis un projet. Et récemment, les deux chanteurs  se sont rencontrés. « Ils se sont assis, face à face, guitares en main pour aborder le répertoire possible ». Ensemble, ils ont produit cet album. « C’est sans directive précise que s’élabore alors le répertoire commun. Les langues se délient au rythme des guitares et c’est avec un naturel évident que le chemin se trace..  Habib regarde et chante l’Afrique, mais un Afrique affectée,  transformée peut-être par le reste du monde. Eric est sensible à cette démarche dans laquelle il se retrouve ».  Sensible aux aspirations sociales, il reprend une chanson de Bob Dylan des années 60 : « Blowin’ in the wind ». « Cette chanson mérite d’être chantée par un  Africain et un Afro-Américain qu’aucun vent ne sépare ». « Tous deux regardent l’être humain  dans un miroir : l’homme qui a l’habitude de se servir en premier en se moquant des conséquences, mais aussi l’homme inquiet qui a besoin de temps, de lumière,de foi, de solidarité, de respect. Puis les guitares partent ici ou là dans des évocations poétique et très personnelles d’airs anciens et immortels »

Eric Bibb et Habib Koité nous prouvent, avec beaucoup de talent, que la chanson  la plus simple est souvent la plus efficace et que chanter comme ils le font est une nécessité universelle. Nous avons besoin de ce type de rencontre par delà les frontières, les modes, les dictats économiques » conclut Etienne Bours. « Parce que cette chanson est vivante, franche et profondément humaine »

En naviguant dans l’univers des médias, sans être expert dans le champ musical, on apprend et on fait des découvertes. Et ainsi, de fil en aiguille, nous avons rencontré cet album avant que l’actualité mette le Mali sur le devant de la scène.. Dans la conjoncture récente, cet album a pris toute sa dimension : non seulement un événement artistique dans « la retrouvaille de deux « songwriters » aux univers complémentaires : le blues de Memphis et le folk mandingue de Bamako, mais aussi un  événement spirituel : une affirmation conjuguée du Bien  et du Beau, l’expression d’une amitié et d’une harmonie, le plaisir joyeux d’être ensemble, un message de fraternité. Aujourd’hui, rétrospectivement, dans la foulée de la libération de Gao et de Tombouctou, nous pouvons voir aussi dans cet événement, une portée politique. Un moment dans l’histoire, un président américain, face à une menace d’invasion, avait proclamé sa solidarité avec les habitants de Berlin en proclamant : « Nous sommes tous des berlinois ».  Nous savons bien que chaque situation est complexe. Les divisions et les fragilités qui existent à l’intérieur du Mali sont connues. Mais, selon le fil conducteur que nous venons de suivre, dans la reconnaissance des grandes valeurs africaines que sont l’hospitalité et la solidarité et dans la conscience de ce qui nous élève et nous unit face à la barbarie, nous pouvons dire, nous voulons dire, comme une affirmation universaliste : « Nous sommes tous frères à Bamako ! ».

 

J H

(1)            Brothers in Bamako.  Habib Koitè. Eric Bibb. Dixiefrog.  Ecouter l’album en entier :

http://www.deezer.com/fr/album/5973303

Présentation de Eric Bibb et Habib Koité sur wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Eric_Bibb  http://fr.wikipedia.org/wiki/Habib_Koité