L’enfant : un être spirituel

 

 

 

 

 

 

Souvenir personnel et sans doute souvenir de beaucoup d’autres : lorsqu’il vient au monde, le petit enfant engendre une dynamique d’amour chez ceux qui l’accueillent. Quelle merveille !

Tout récemment, dans une enquête, en réponse à la question : « Quel événement à venir pourrait susciter un émerveillement de votre part ? », la naissance arrive en tête (38%), suivie d’assez près par la joie d’un  enfant (33%) (1).

Cependant, d’après le travail des historiens, on sait que l’attention et le respect portés à l’enfant n’allaient pas de soi autrefois. Loin de là. Cette attention et ce respect se sont développées à partir du moment où les sociétés sont peu à peu sorties de l’oppression engendrée par la mortalité infantile, la sous nutrition, une violence latente…Pendant longtemps, en regard des adultes, le statut des enfants a été négligeable. Au début du XXè siècle encore, les mentalités ne sont pas prêtes à reconnaître le potentiel du petit enfant. A travers une œuvre pionnière, la doctoresse italienne, Maria Montessori, met en valeur ce potentiel, et, dans un livre rayonnant : « L’enfant » (2), elle parle de celui-ci en terme d’ « embryon spirituel ». Aujourd’hui où le concept de spiritualité est désormais reconnu et jouit d’une large audience, des recherches récentes viennent de mettre en évidence les dispositions spirituelles présentes chez l’enfant. Une recherche, réalisée par Rebecca Nye et David Hay, auprès d’enfants britanniques de 6 à 10 ans, a mis en évidence leurs aptitudes spirituelles en terme de « conscience relationnelle » (3).

Rebecca Nye nous décrit ainsi la spiritualité des enfants (4).

« La spiritualité des enfants est une capacité initialement naturelle pour une conscience de ce qui est sacré dans les expériences de vie. Cette conscience peut être ressentie ou pas, mais dans les deux cas, elle influe sur les actions, les sentiments et les pensées. Dans l’enfance, la spiritualité porte particulièrement sur le fait d’être en relation, de répondre à un appel, de se relier à plus que moi seul, c’est à dire aux autres, à Dieu, à la création ou à un profond sens de l’être intérieur (inner sense of self). Cette rencontre avec la transcendance peut advenir dans des expériences ou des moments spécifiques aussi bien qu’à travers une activité imaginative ou réflexive » (p.6).

Beaucoup d’expériences quotidiennes dans la vie de l’enfant se prêtent à un vécu spirituel. Aussi comprendre l’enfance est fondamental pour une compréhension plus générale de la spiritualité. Comprendre l’enfance, c’est percevoir entre autres, les réalités suivantes :

« ° Les enfants ont une façon plus holistique de voir les choses. Ils ne les analysent pas autant si bien que leur perception a un caractère plus mystique.

° Les enfants sont particulièrement ouverts et curieux. Aussi ont-ils une capacité naturelle d’émerveillement.

° La vie émotionnelle des enfants est au moins aussi forte que leur vie intellectuelle. Aussi savent-ils ce que c’est de s’abandonner à des forces qui transcendent leur contrôle.

° Les enfants manquent de connaissances sur beaucoup de choses. Pour eux, le mystère est une réalité profonde, généralement non menaçante, amicale et ils y répondent par un respect et une recherche de sens dans tous leurs jeux quotidiens.

° Les enfants acceptent que leurs mots ne suffisent pas à décrire pensées et sentiments. Aussi savent-ils que la valeur et l’importance réelle dépassent ce qui peut être dit. Ils se sentent à l’aise dans l’ineffable, l’indicible » (p.8)

« La découverte majeure de toutes ces études est que la spiritualité est une caractéristique commune naturelle, chez la plupart des enfants, probablement tous. Certainement aucune étude ne fait apparaître un type d’enfant qui ne possède pas des aptitudes spirituelles actives. D’un point de vue chrétien, cela fait sens, puisqu’on comprendrait difficilement pourquoi certaines personnes seraient créées sans une capacité instinctive de répondre à notre Créateur » (p.9). Les études sur la spiritualité des enfants éclairent notre compréhension de la spiritualité des adultes . « Un nombre surprenant d’adultes citent un souvenir d’enfance comme leur expérience spirituelle la plus importante… ». Au total, on constate que « la spiritualité des enfants est plus naturelle qu’apprise, que peut-être le terrain le plus fertile pour la spiritualité se situe dans l’enfance , que la spiritualité de l’enfance se répercute sur l’âge adulte, et que la spiritualité est profondément relationnelle » (p.11).

 Ces recherches viennent apporter une confirmation de ce que nous ressentions plus ou moins clairement. Oui, l’enfant est un être spirituel. Pendant des siècles, cette réalité a été largement méconnue. Ainsi les paroles de Jésus concernant les enfants étaient à contre courant. Aujourd’hui, elles retentissent avec une force inégalée. Maintenant, elle inspire les théologiens (5) et, pour nous, elles éclairent notre cœur et notre entendement. Jésus dit : « Laissez les petits enfants, et ne les empêchez pas de venir à moi ; car le Royaume des Cieux est pour ceux qui leur ressemblent » (Matthieu 19.14). « Quiconque reçoit en mon nom un de ces petits enfants me reçoit moi-même…( Marc 9. 37) ». Le commentaire de Rebecca Nye est éclairant : l’approche de Jésus vis à vis des enfants paraît appuyer l’idée que leur spiritualité reflète un état d’être quotidien. Les enfants sont accueillis et bénis et c’est au hasard que Jésus met un enfant en évidence. Cette réflexion nous éclaire sur la portée des recherches sur la spiritualité des enfants. De la même façon, Jésus s’est référé aux enfants (sans spécifier leur âge) comme « ceux dont les anges dans le ciel voient constamment la face de mon Père dans les cieux » (Matthieu 18.10). Cela suggère que les enfants jouissent d’une perception toute particulière.

C’est une forte invitation à penser que les adultes ont des choses à apprendre de la manière des enfants d’être simplement eux-mêmes et sur la relation pouvoir autorité entre les adultes et les enfants.

La découverte actuelle de la spiritualité des enfants s’inscrit dans le tournant culturel et religieux en cours durant les vingt dernières années (6). Mais, en même temps, ce phénomène est l’aboutissement de tendances à plus long terme. Ainsi le courant de l’éducation nouvelle se manifeste tout au long du XXè siècle. De même, le thème de la spiritualité a pris une importance croissante dans les dernières décennies.

La prise de conscience de la dimension spirituelle des enfants marque également une rupture avec les séquelles d’idées et de représentations installées en Occident pendant des siècles. Ainsi l’enfant était perçu comme entachée par une corruption issue du péché originel avec toute la représentation négative qui en résultait. On frémit à la manière dont certains envisageaient le sort des enfants décédés sans avoir été baptisés. Et par ailleurs, en mettant l’accent sur la petitesse et l’humilité des enfants et non sur leur potentiel de vie, la perception traditionnelle était aussi empreinte de négatif. Mais, en même temps, la reconnaissance croissante de la spiritualité des enfants s’affirme aujourd’hui à l’encontre d’une idéologie scientiste, rationaliste qui a occupé une place importante dans le paysage culturel du siècle dernier. Bien sûr, on doit également se garder d’une idéalisation excessive de l’enfant. Celui-ci participe à notre humanité avec ses travers et ses dérives, mais une vision nouvelle est apparue.

Aujourd’hui, nous assistons au développement d’une représentation nouvelle de la vie humaine. « Bénir, signifie littéralement : appeler le bien à se manifester », nous dit Rebecca Nye. Ainsi avons-nous besoin de reconnaître le bien là où il est pour l’encourager à s’épanouir. Voilà une approche souhaitable dans notre représentation de l’homme bien au delà de l’enfance.

L’enfant : un être spirituel. C’est un regard nouveau. Nous découvrons ce que nous pressentions. Quelle merveille !

 

JH

 

(1)            Sur ce blog : Ce qui nous émerveille. Sur le site de Témoins : « Reconnaître le fait spirituel : un sondage sur l’émerveillement » http://www.temoins.com/enqu-tes/reconnaitre-le-fait-spirituel.-un-sondage-sur-l-emerveillement.html

(2)            Montessori (Maria). L’enfant. Desclée de Brouwer (édition originale : 1936)

(3)            Hay (David). Something there. The biology of human spirit. Darton, Longman and Todd, 2006. Sur le site de Témoins : La vie spirituelle comme « conscience relationnelle ». http://www.temoins.com/etudes/la-vie-spirituelle-comme-une-conscience-relationnelle.html

(4)            Nye (Rebecca). Children’s spirituality. What it is and why it matters. Church House Publishing, 2009

(5)            Sur le site de Témoins : « Découvrir la spiritualité des enfants. Un signe des temps ». Un chapitre sur la théologie de l’enfant. http://www.temoins.com/etudes/decouvrir-la-spiritualite-des-enfants.-un-signe-des-temps/toutes-les-pages.html

(6)             Sur le site : expérience et théologie : Ursula Tissot. Comment le Dieu qui s’est fait enfant rejoint notre enfant intérieur. http://www.experience-theologie.ch/reflexions/ressourcement/comment-ce-dieu-qui-s’est-fait-enfant-rejoint-notre-enfant-interieur/

Un nouvel an, ensemble, en route…

Nouvel An. Un commencement… Comment est ce que nous considérons l’avenir ? On sait que les représentations de l’avenir varient selon les religions, les civilisations. Notre représentation de l’histoire est inspirée, implicitement ou explicitement par le message que nous avons reçu à travers la Bible, une foi en la promesse de Dieu qui nous met en mouvement à l’exemple d’Abraham ou du peuple juif sortant d’Egypte pour une nouvelle destinée. Et pour les chrétiens, entendre que Christ est ressuscité d’entre les morts et que la puissance de Dieu est à l’œuvre, dès maintenant, pour accomplir la résurrection des morts et la libération de l’humanité et de la nature, nous parle « dans un même mouvement du fondement de l’avenir et de la pratique de la libération des hommes et de la rédemption du monde » (Jürgen Moltmann, Jésus, le Messie de Dieu (Cerf), p. 328). C’est le fondement d’une théologie de l’espérance. C’est une inspiration pour notre société en ce temps de crise où les menaces abondent, et aussi, pour nous personnellement dans un chemin où se mêlent les joies et les épreuves et où parfois on ne voit plus clair.

 

A un moment où on prend de plus en plus conscience des interrelations entre l’humanité et la nature dans laquelle elle s’inscrit, un exemple issu du monde animal vient nous apporter un éclairage qui fonctionne comme une parabole.

Le magnifique film sorti en 2001 : « Le peuple migrateur » est présent dans nos mémoires … et aujourd’hui accessible sur internet :

http://www.youtube.com/watch?v=ks_nLiTSvb4

Et, sur le site Flickr, on trouve des photos parfois impressionnantes d’oiseaux en migration. En voyant les images des oies sauvages en vol pour échapper au froid de l’Arctique et gagner les pays du soleil, comment ne pas admirer l’instinct qui les conduit. On est saisi par la beauté de ces créatures. Et lorsqu’on sait qu’un vol d’oies sauvages est aussi une expérience collective où une solidarité se manifeste, n’est-ce pas pour nous une source d’inspiration, la métaphore d’un mouvement où la foi s’exercerait dans la communion. Ainsi, en ce Nouvel an, une superbe photo de ces oies en vol nous interpelle :

http://www.flickr.com/photos/warmphoto/6320042255/lightbox/

Elle nous suggère foi, courage, solidarité. N’aspirons-nous pas aussi à faire route les uns avec les autres comme beaucoup d’hommes déjà engagés sur ce chemin ?

 

JH

Voir Dieu dans la nature

Lorsque je suis sensible à la beauté de la nature, j’entre dans un état d’esprit où je perçois en elle une réalité qui me dépasse, un mouvement qui m’inspire. A ce moment, je ne suis plus un observateur détaché. Je reconnais un mouvement de vie dans les êtres qui m’entourent. Je participe à un mystère. On peut citer Einstein : « Il y a deux manière de vivre la vie : l’une, c’est comme si il n’y avait de miracle nulle part. L’autre, c’est comme si tout était miracle ». Sans doute, les positions sont moins tranchées . Il y a place pour des registres de regard différents, mais pas incompatibles entre eux. Mais la pensée d’Einstein nous invite à aller plus loin : « La plus belle émotion que nous puissions éprouver, c’est le sentiment du mystère. C’est une émotion fondamentale qui est au berceau de tout art , de toute science véritables ». Dans mon évolution personnelle, j’ai pris de plus en plus conscience que l’on pouvait percevoir Dieu à l’œuvre dans la nature.

 

 

         Dieu dans la création

Jürgen Moltmann m’a aidé dans cette prise de conscience (Dieu dans la création (Cerf 1988). « Le Dieu trinitaire inspire sans cesse la création. Tout ce qui est, existe et vit grâce à l’affluence permanente des énergies… Ainsi il nous faut comprendre toute réalité créée de façon énergétique, comme possibilité réalisée de l’Esprit divin. Grâce aux possibilités et énergies de l’Esprit, le Créateur lui-même est présent dans sa création. Il ne s’oppose pas seulement à elle par sa transcendance, mais entre en elle et lui demeure en même temps immanent » (p 23).

« Tu ouvres ton souffle, ils sont créés. Tu renouvelles la face de la terre » (Psaume 104/29-30).

« L’Esprit saint est « répandu » sur toutes les créatures. La source de vie est présente dans tout ce qui existe et qui est vivant. Tout ce qui existe et vit, manifeste la présence de cette source de vie divine » (p 24).

 

 

         Dieu à l’œuvre. Un regard concret et émerveillé

Comment notre regard peut-il alors s’exercer. Scientifique, philosophe et théologien, Roy Abraham Varghese nous aide à voir ce monde comme une merveille et à percevoir Dieu à travers cette merveille. (The wonder of the world. Fountain Hills, 2003).

« Nous pouvons reconnaître l’existence de Dieu et en devenir conscient simplement en percevant les choses autour de nous. C’est l’acte de voir les choses comme créées, comme nécessitant l’existence de Dieu pour expliquer leur existence, comme dépendant de lui et finalement comme manifestant l’infini ici et maintenant. Juste comme nous voyons un poème comme un poème, et pas comme des signes imprimés, et ne pouvons le voir comme autre chose qu’un poème, de la même façon, nous ne pouvons voir les choses autour de nous seulement comme un ensemble d’atomes. mais comme des réalités qui manifestent et reflètent Dieu ». (p 62) ;

« Les senteurs et les couleurs d’une belle rose nous viennent de Dieu, manifestant sa divine présence. Naturellement, la rose n’est pas Dieu ou une partie de Dieu. Mais la rose, dans sa totalité, non seulement reflète la gloire de Dieu comme une magnifique œuvre littéraire manifeste l’esprit de son auteur, mais aussi elle nous rend Dieu présent comme une manifestation immédiate et constante de :

– la puissance divine qui la tient en existence et soutient ses activités

– L’infinie intelligence qui l’a conçue.

– La beauté ineffable à partir de laquelle ses couleurs et ses senteurs rayonnent…

Voir une rose, c’est voir une manifestation immédiate et concrète de la créativité, de l’intelligence et de l’énergie infinie. C’est voir Dieu ici et maintenant » (p 64-65)

 

 

Alors en présentant quelques photos de fleurs, non seulement nous suscitons un  émerveillement, mais nous pouvons en même temps nous ouvrir à une méditation en y percevant la présence de Dieu à travers sa création.

 

 

 

 

 

Partageons ensemble notre regard sur la nature, la manière dont nous y percevons la présence de Dieu.

 

JH

 

plus de photos de Catpiper et Ecstaticist sur flickr