Méditer avec Moltmann

Une vision d’espérance mise à la disposition de tous.

Au fil des années, nous avons pu constater combien la théologie de Jürgen Moltmann répondait aux aspirations et aux questionnements d’un vaste public. Ce recueil : Méditer avec Moltmann (1) s’inscrit dans cette approche. Par son accessibilité, il met la théologie de Moltmann à la portée de tous. Et pour quoi donc? L’avertissement en quatrième de couverture nous le dit :

« Dans l’histoire dont nous faisons l’expérience, il nous est plus facile de désigner le négatif dont nous voulons nous libérer que d’exprimer le positif en vue duquel nous espérons devenir libre. Mais c’est l’expérience d’un avenir plus grand qui nous mène vers des expériences  toujours nouvelles ».

Le secret de la force mobilisatrice de la pensée de Moltmann se trouve dans la profondeur des réflexions existentielles qu’il nous propose. Mais, pour que cette force nous rejoigne et nous transforme à notre tour, elle doit être méditée, digérée, expérimentée, confrontée aux joie et aux peines de notre existence. L’incarnation de l’espérance s’inscrira alors dans notre parcours de vie ».

Les textes rassemblés ici (2) proviennent du blog : « L’Esprit qui donne la vie », créé en 2011, pour communiquer la pensée de Moltmann à tous ceux qui sont à la recherche d’un Dieu, communion d’amour et puissance de vie. Il n’est pas anodin que l’éditeur ait, de lui-même choisi comme titre : « Le sourire de Dieu ».

Ce livre nous ouvre à une nouveauté de vie. Dans son adresse aux étudiants de Prétoria, qui introduit le recueil, Jürgen Moltmann déclare : « Celui qui croit au « Dieu vivant », voit le monde non seulement selon la réalité… mais aussi selon les possibilités. « Tout est possible à celui qui croit », parce que « tout est possible avec Dieu » . Toute la réalité est une possibilité réalisée. La possibilité vient en premier, la réalité vient après » (p 13). Ce livre regarde à la promesse de Dieu et nous ouvre un avenir. Dans le témoignage sur lequel s’achève ce recueil, homme de foi et d’action engagé dans de grandes causes humanitaire, Guy Aurenche nous confie une notation personnelle : « En refermant provisoirement ce livre de méditation, me vient l’appétit d’un commencement caché » ( p 156).

Au fil des années, nous avons pu constater combien la théologie de Jürgen Moltmann était libératrice, féconde et éveillait des échos chez des amis de formations et de cultures très différentes. La théologie de Moltmann est un continent. Chacun vient y chercher une réponse à ses questionnements. C’est un dialogue à partager.

J H

  1. Jean Hassenforder. Méditer avec Moltmann. Le sourire de Dieu. Préface : Discours de Jürgen Moltmann aux étudiants de Pretoria, traduit par David Gonzalez. Postface par Guy Aurenche. Empreinte Temps présent. 2019 (Collection : l’art de méditer dirigé par David Gonzalez).
  2. Issus du blog : « L’Esprit qui donne la vie », les textes sont entrés ensuite dans un processus d’édition, dans lequel, à notre regret, le référencement initial n’a pas été retranscrit. A ce sujet, on se reportera donc au blog originel : https://lire-moltmann.com

Le New Deal Vert

le-new-deal-vert« Un plan économique pour sauver la vie sur terre »

Selon Jeremy Rifkin

La menace du dérèglement climatique est aujourd’hui de plus en plus fortement ressentie. Elle engendre un grand désarroi. En effet, le danger paraît de plus en plus pressant. Alors la crainte commence à grandir. L’horizon se ferme. On envisage le pire. C’est le thème de l’effondrement. Sans aller jusqu’à cette extrémité, l’avenir paraît bien sombre. Cependant, l’alerte est donnée et les forces politiques, économiques et sociales se mobilisent. Quel enjeu ! Le temps presse !.

C’est un problème complexe. Pour l’aborder, il faut envisager l’évolution de notre économie dans son ensemble. C’est ainsi que procède l’approche de Jeremy Rifkin dans son nouveau livre : « Le New Deal Vert mondial » (1). Nous y voyons apparaitre une issue, un chemin.

Jeremy Rifkin n’est pas un inconnu (2). C’est un économiste américain engagé dans la prospective depuis trente ans. Ainsi est-il devenu un conseiller écouté auprès d’autorités politiques ouvertes au changement. Il milite aux Etats-Unis. Il est entendu en Chine. Il est très présent en Europe.

La troisième révolution industrielle.

En 2012, il publie un livre intitulé : « La Troisième Révolution Industrielle » (3). A l’époque, on commence à sortir de la crise économique qui a éclaté aux Etats-Unis et a bouleversé l’économie mondiale. Ce choc a entrainé un grand désarroi. Or, dans ce livre, Jeremy Rifkinnous apporte une vision d’ensemble qui éclaire le phénomène et ouvre un horizon. En nous y reportant, nous y voyons déjà une anticipation de la crise écologique actuelle et le début d’une réponse. En effet, Jeremy Rifkin analyse le phénomène en terme de révolution industrielle. Succédant à la grande émergence du XIXè siècle, une seconde révolution industrielle apparaît au XXè siècle.

Dans la seconde moitié de ce siècle, « la conjonction de l’électricité centralisée, de l’ère du pétrole, de l’automobile et des banlieues pavillonnaires a d’abord suscité un grand essor économique qui a pris fin dans les années 80 ». Cet essor s’est ralenti. On s’est appuyé alors sur l’épargne accumulée dans les décennies prospères et sur des pratiques de crédit facile. Cette ressource s’est épuisée et la crise a éclaté. Cette crise est issue de la décélération de la deuxième révolution industrielle. Poussé à l’excès, le mariage du pétrole abondant et de l’automobile a entrainé une hausse du prix du pétrole qui a provoqué un effondrement financier.

A ce stade, Jeremy Rifkin peut ajouter : « La facture entropique des première et deuxième révolutions industrielles arrive à échéance. Les conséquences de la quantité de dioxyde de carbone envoyée dans l’atmosphère terrestre se fait maintenant sentir et il en résulte une grave menace de changement climatique ». Ainsi, dès le début de cette décennie, l’auteur prévoit la crise climatique qui s’accélère aujourd’hui. Et, ayant posé le diagnostic, il commence à dessiner un avenir nouveau. « Au cours de mes investigations, j’ai fini par comprendre que les grandes évolutions économiques de l’histoire se produisent quand de nouvelles technologies de communication convergent avec de nouveaux systèmes d’énergie ». Or cette conjonction est en cours aujourd’hui. « Les technologies d’internet et les énergies renouvelables sont en voie de fusionner pour créer une puissante infrastructure nouvelle, celle de la troisième révolution industrielle qui va changer le monde ». Ainsi aujourd’hui, le nouveau livre de Jeremy Rifkin n’apparait pas soudainement. Il prend la relève d’une orientation déjà esquissée en accentuant la composante écologique.

 

Emergence d’une nouvelle économie : une économie verte numérique

« Les grandes transformations économiques de l’histoire ont un dénominateur commun. Elles reposent sur trois éléments dont chacun interagit avec l’autre pour que le système fonctionne comme un tout : un medium de communication, une source d’énergie, un mécanisme de transport » (p 23). Il se forme ainsi une infrastructure commune. La nouvelle économie du XXIè siècle est en train d’émerger. C’est « une économie verte numérique ». Aujourd’hui, « la communication internet numérique converge avec l’énergie internet numérique renouvelable alimentée par une électricité d’origine solaire et éolienne et l’internet de mobilité et de logistique numérique composé de véhicules autonomes électriques équipés d’une pile à combustible, alimentée par une énergie verte, outre une plateforme IdO ( internet des objets) présente dans le parc immobilier, commercial, résidentiel et industriel, le tout étant destiné à métamorphoser l’économie et la société du XXIè siècle » (p 24).

Toutes les composantes se relient les unes avec les autres. Il en résulte d’énormes avantages économiques. En appelant : « coût marginal de production », le coût de production d’une unité supplémentaire de biens ou de services, une fois que les frais fixes ont été absorbés (p 25), on va observer une baisse considérable de ces coûts. « Dans cette économie verte numérique, le coût marginal de certains biens et services sera proche de zéro ce qui obligera à un changement radical du système capitaliste ». L’auteur nous apporte de nombreux exemples. « la propriété cède le pas à l’accès… Les marges de certains biens et de certains services sont tellement « proches de zéro » que les profits ne sont plus viables… Partout dans le monde, de plus en plus de gens produisent leur propre électricité d’origine solaire et éolienne pour un usage hors réseau et/ou pour la vendre au réseau pour un coût marginal proche de zéro » (p 27).

De même que les deux premières révolutions industrielles ont requis la mise en place de grandes infrastructures, il en va de même pour la nouvelle économie. Et cela vaut dans tous les secteurs : communication, énergie, transports. Dans le court terme, les deux ou trois prochaines décennies, le travail va être considérable. Le développement de ces infrastructures requiert un engagement des pouvoirs publics. « La mise en place de l’IdO – internet de la communication, internet de l’énergie, internet de la logistique – va donner naissance à une dernière vague de travail qui durera une trentaine d’années » (p 31). Par la suite, à moyen et long termes, une quantité croissante de jobs vont migrer du secteur du marché à l’économie sociale et à l’économie de partage (p 31). Le secteur non lucratif est déjà en forte croissance.

 

Victoire des énergies renouvelables et reflux du CO2

Dans un contexte où la menace climatique se fait de plus en plus pressante, la question n’est pas seulement l’orientation suivie, mais la vitesse du processus. Or, sur ce point, Jeremy Rifkin nous apporte une bonne nouvelle, une nouvelle décisive. Les énergies solaires et éoliennes sont désormais « meilleur marché que les raffineries à gaz, les centrales à charbon et les réacteurs nucléaires les plus efficaces » (p 162). Et cet avantage compétitif va s’accroitre rapidement. « La production d’énergie solaire et éolienne suit une courbe de coût exponentielle nettement descendante, pas loin de la courbe exponentielle qu’a récemment connu l’industrie informatique… En 1977, le coût fixe par watt des cellules photovoltaïques par silicone utilisées pour les panneaux solaires étaient à 76 dollars. Aujourd’hui, il a chuté à moins de 50 centimes de dollar… L’impact des ces énergies vertes est impressionnant » (p 69-70). Plus les énergies renouvelables seront moins couteuses, plus les investissements financiers vont se détourner des énergies fossiles. Et les installations correspondant aux énergies traditionnelles vont se dévaloriser. En perdant de leur valeur, elles deviennent des « actifs bloqués ». L’énergie nucléaire est elle aussi dépassée (p 84).

« La rampe de sortie qui mène d’un système fondé sur les combustibles fossiles à un réseau fondé sur le solaire et l’éolien se manifeste quand ces derniers franchissent un cap de 14 à 16% de pénétration. Le cap a été franchi par l’Union européenne en 2017 » (p 130). Nous approchons ainsi d’un mouvement de bascule. Et tout indique que ce mouvement va intervenir dans les prochaines années. Ce sera un facteur majeur de réduction de CO2. Des analyses financières récentes montrent que l’effondrement de la révolution industrielle fondée sur les combustibles fossiles est imminente. Il pourrait se produire entre 2023 et 2030 puisque ce sont des secteurs essentiels qui se séparent de ces combustibles et qui reposent de plus en plus sur des énergies moins onéreuses, solaires, éoliennes et autres énergies renouvelables et sur les technologies zéro carbone qui les accompagnent (p 17).

Dans la confrontation avec la dérégulation climatique, nous vivons une course contre la montre. Alors la vision du processus en cours nous encourage vivement. « Les forces du marché sont en train de venir à bout de la civilisation des énergies fossiles… Les principales filières de l’économie – TIC/télécommunications, internet, électricité, transports, bâtiment – abandonnent ces combustibles pour investir dans les énergies renouvelables et ouvrent la voie à l’émergence de la troisième révolution industrielle. Certaines études ont fixé la date du point de bascule à 2023, d’autres à 2035. Si l’on compare les différents scénarios et les différentes projections, l’inflexion devrait avoir lieu à mi-chemin et l’effondrement de la civilisation des combustibles fossiles devrait se produire autour de 2028… En l’état, les forces du marché sont plus puissantes que les manœuvre des lobbies… J’ai toujours été critique vis à vis de certains aspects du capitalisme de marché. Sauf que, pour une fois, la disruption est elle que le marché fait figure d’ange gardien de l’humanité » (p 251). Mais cela ne suffira pas. « Construire une civilisation écologique à partir des cendres de la nôtre est une entreprise collective qui implique de mobiliser le capital public, le capital de marché et le capital social à tous les niveaux de gouvernance Elle implique aussi la participation de tout le corps politique » (p 251).

 

Les forces agissantes pour une économie verte décarbonée

Non seulement Jérémy Rifkin nous montre un processus qui nous amène à une réduction drastique de l’émission de CO2, mais il nous décrit les forces actuellement à l’œuvre pour l’avènement d’une nouvelle économie. Si les autorités politiques commencent à se mobiliser face à l’urgence de la menace climatique, on peut s’inquiéter de la lenteur de cette mobilisation, et pire du déni de certains dirigeants comme le président actuel des Etats-Unis. Expert souvent consulté à l’échelle mondiale, Jeremy Rifkin peut nous apporter un état de la situation. Globalement, celle-ci nous paraît meilleure qu’escomptée. L’Europe est en marche. La Chine réagit avec puissance. Les Etats-Unis sont en retard, handicapés par un président désastreux, mais en action vigoureuse dans certains états et dans certaines villes. « Je sais, pour avoir conseillé des dirigeants de l’Union européenne et de la Chine, que ces deux gouvernements ont adopté des politiques comparables pour réagir au changement climatique. Ils savent qu’ils ont mission de séparer chaque filière et chaque industrie de l’infrastructure de la dernière révolution industrielle pour la rattacher à celle de la troisième révolution industrielle » (p 240). « L’Union européenne est passée d’une longue liste de projets isolés à la volonté explicite d’une transformation économique et sociétale » (p 236). Et aujourd’hui, « la notion de civilisation écologique est au cœur de la politique intérieure de la Chine » (p 242). « La Chine est désormais le premier producteur de technologies solaires et éoliennes efficaces et peu coûteuses qu’elle a commencé à exporter dans le monde entier » (p 137).

Aux Etats-Unis, si le gouvernement fédéral est actuellement immobile, il y a des états et des villes très dynamiques dans ce domaine. 29 états ont adopté une législation nommée RPS (Renewable porfolio standards) qui veut qu’un certain pourcentage d’électricité soit issu d’énergies renouvelables. Certains gouverneurs sont en train de s’organiser pour que 100%de l’électricité soit issue de sources sans carbone (p 263). L’idée d’un New Deal vert gagne du terrain sur le plan politique.

 

Une nouvelle organisation politique

Jéremy Rifkin met l’accent sur le rôle décisif du marché dans la chute des énergies fossiles et la montée des énergies renouvelables. Mais ensuite il y a nécessité de réaliser de nouvelles infrastructures dans tous les domaines, par exemple dans la circulation de l’énergie. Et, là, les pouvoirs publics ont un rôle majeur et spécifique à jouer. De même que les énergies renouvelables se développent et sont exploitées au niveau local, de même, selon Jeremy Rifkin, la nouvelle économie est en phase avec une gestion décentralisée dans les régions. En Europe, Jeremy Rifkin conseille des expériences régionales, par exemple dans les Hauts-de-France. Ainsi, on n’attend plus des pouvoirs publics une intervention centralisée, mais la mise en place d’infrastructures permettant le développement coordonné de réalisations locales. Le New deal vert « sera centré sur des énergies renouvelables exploitées localement et gérées par des infrastructures régionales connectées entre elles au delà des frontières » (p 261). Ce sera une gestion participatives impliquant des « assemblées de pairs » constituées localement (p 266-267).

 

Pour une civilisation écologique

Dans ce livre, Jeremy Rifkin témoigne d’un immense savoir économique, sociologique, politique, à l’échelle internationale. Mais, c’est aussi, nous le savons par ailleurs, un homme de conviction qui affirme des valeurs. Ses convictions écologiques datent de loin (4), bien avant que cette question passe au devant de la scène. C’est un homme qui croit en la communauté humaine. Ainsi a-t-il écrit un livre remarquable sur l’empathie (5).

Ainsi, si cet ouvrage sur le New Deal Vert entre dans la technicité des rouages de l’économie, Jeremy Rifkin ne se réduit pas à une froide rationalité. Il participe à notre sensibilité écologique ; ainsi prend-il une distance critique par rapport à une apologie du progrès par Condorcet dans son « Esquisse des progrès de l’esprit humain ». « La vision de Condorcet est devenue emblématique dans ce qu’on appellera l’ère du progrès. Hélas aujourd’hui, nous savons ce qu’elle implique… vu les ravages provoqués par la civilisation des énergies fossiles. Rares sont ceux qui osent parler tout haut d’« ère du progrès » ou de perfectibilité de l’homme. Nous vivons à l’ère de la résilience et l’infrastructure du New Deal vert est conçue pour cette ère… Cette infrastructure implique une subversion de la conscience autant qu’une subversion de l’infrastructure » (p 117).

Le changement requiert une éthique personnelle et une éthique sociale. Ainsi, Jeremy Rifkin lance un « appel en faveur d’une politique des pairs et d’une gouvernance des communaux qui donneront le pouvoir à des communautés prenant en charge leur avenir alors que nous traversons une période très sombre de l’histoire de la terre. » (p 272).

« Nous avons cru que nous étions maitres de notre destin et que la terre était à notre disposition. Nous n’avions pas compris que la facture de l’entropie se paye par tout ce qui attente à la planète. Nous entrons dans une nouvelle ère, un nouveau paysage. L’âge de la résilience nous attend. L’acclimatation à cette nouvelle réalité planétaire est déterminante pour notre futur en tant qu’espèce. Il est temps de prendre conscience de la biosphère. Espérons que nous y arriverons à temps. Voilà le New Deal Vert auquel le crois » (p 272).

 

Une proposition majeure

La lecture de ce livre nous parait indispensable. C’est un livre majeur, indispensable pour nous situer dans le monde d’aujourd’hui à un moment où la question écologique est devenue centrale. Nous y apprenons à nous situer dans une histoire, à comprendre les processus en cours, et, conscient du péril, à découvrir un nouveau chemin. C’est dire combien ce livre est, à nous tous, nécessaire. Face à la peur, à la violence que celle-ci engendre, aux enfermements idéologiques qu’elle suscite, ce livre ouvre des pistes constructives. Il écarte le fatalisme, le catastrophisme aussi bien que le déni et l’immobilisme. On voit aussi combien l’intelligence permet d’éviter les étroitesses de vue et leurs conséquences. Parce qu’il ouvre l’espoir, ce livre permet et engendre la mobilisation. Aussi, à ce titre, évoquons-nous une parole d’espérance citée par Jürgen Moltmann à la fin d’un chapitre sur les catastrophes (6). C’est l’expression d’un poète allemand Friedrich Holderlin : « Au milieu du danger se développe le salut ».

 J H

 

  1. Jeremy Rifkin. Le New Deal Vert Mondial. Pourquoi la civilisation fossile va s’effondrer d’ici 2028. Le plan économique pour sauver la vie sur terre. Les liens qui libèrent, 2019 Interview vidéo sur son livre : https://www.youtube.com/watch?v=d49ZHoClJf4
  2. Parcours de Jeremy Rifkin : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeremy_Rifkin
  3. Jeremy Rifkin. La Troisième Révolution Industrielle. Comment le pouvoir latéral va transformer l’énergie, l’économie et le monde. Les Liens qui libèrent, 2012
  4. Mise en perspective : « Face à la crise : un avenir pour l’économie » : https://vivreetesperer.com/face-a-la-crise-un-avenir-pour-l’economie/
  5. Dès 1988, Jeremy Rifkin fait se rencontrer des scientifiques du climat et des militants écologistes de 35 pays à Washington pour une première réunion du Réseau mondial sur l’effet de serre (Wikipedia)
  6. Jeremy Rifkin. Une nouvelle conscience pour un monde en crise. Vers une civilisation de l’empathie. Les liens qui libèrent. 2010 A propos du livre de Jeremy Rikfin : https://www.temoins.com/vers-une-civilisation-de-lempathie-a-propos-du-livre-de-jeremie-rifkinapports-questionnements-et-enjeux/
  7. Jürgen Molttmann. De commencements en recommencements. Empreinte Temps présent, 2012 (p 69)

 

Plusieurs livres à lire parallèlement à ce livre :

Isabelle Delannoy. L’économie symbiotique. Régénérer la planète, l’économie et la société. Préface de Dominique Bourg. Actes Sud, 2017 Un livre essentiel qui, dans son originalité mettant l’accent sur les éco-systèmes du vivant, peut être lu en convergence avec celui-ci. Mise en perspective : « Vers une économie symbiotique » : https://vivreetesperer.com/vers-une-economie-symbiotique/

Jean Staune. Les clés du futur. Réinventer ensemble l’économie, la société et la science. Préface de Jacques Attali. Plon, 2015

Mise en perspective : « Comprendre la mutation actuelle de notre société requiert une vision nouvelle du monde » : https://vivreetesperer.com/comprendre-la-mutation-actuelle-de-notre-societe-requiert-une-vision-nouvelle-du-monde/

Thomas L Friedman. Thank you for being late. An optimist’s guide to thriving in the age of accelerations. Penguin Random House, 2015. Mise en perspective : « Un monde en changement accéléré » : https://vivreetesperer.com/un-monde-en-changement-accelere/

 

 

 

Libérer le potentiel du jeune enfant dans un environnement relationnel

Une année pour changer l’école

Avec Céline Alvarez

« Après une expérience pilote dans une zone d’éducation prioritaire en France, Céline Alvarez a été invitée par la ministre belge de l’Enseignement à accompagner 750 enseignants pendant une année scolaire. Ils ont réaménagé leur classe, trié les activités et individualisé la transmission, et ce, sans moyens supplémentaires. En quelques semaines, les enfants sont devenus autonomes, confiants et sereins. Dès la maternelle, ils sont entrés spontanément dans la lecture ». Cette notice, en quatrième de couverture, décrit brièvement l’expérience relatée dans un livre, au titre énigmatique au premier abord : « Une année pour tout changer et permettre à l’enfant de se révéler » (1). Et la notice se poursuit en ouvrant l’horizon : « Ce livre montre que nous pouvons susciter un changement à grande échelle, basculer de l’ennui à la motivation, de l’indiscipline au calme, du manque de persévérance à la créativité ». Ainsi la confiance peut s’affirmer : « Permettre à l’enfant de se révéler, c’est possible. Une année peut tout changer ».

En initiant et en accompagnant cette expérience à grande échelle, Céline Alvarez est effectivement en mesure, à partir d’observations, de dialogues et de témoignages de nous montrer très concrètement les changements qui sont intervenus dans les attitudes et les pratiques, le processus de changement jusque dans le moindre de ses aspects.

Cette expérience n’est pas advenue par hasard. Elle est l’aboutissement d’un parcours de recherche, d’un engagement. Céline Alvarez, munie d’un master de sciences du langage, s’est formée ensuite à la méthode Montessori. En 2009, elle passe le concours de professeur de écoles. Ayant obtenu l’accord du Ministère de l’Education Nationale, de 2011 à 2014, elle réalise une expérimentation pédagogique auprès d’enfants issus d’une zone d’éducation prioritaire dans une école maternelle à Gennevilliers. Elle se fonde sur les travaux scientifiques des docteurs Seguin et Montessori enrichis par l’apport des neurosciences grâce à l’équipe de Stanislas Dehaene. Cette expérience s’avère une grande réussite. Les enfants sont plus autonomes, font preuve de remarquables aptitudes sociales, savent mieux lire. Cependant, après ces trois années d’expérimentation, l’Education Nationale ne renouvelle pas le contrat. Céline Alvarez démissionne et va tirer tous les enseignements de cette expérience en développant des formations et les outils correspondants et en publiant un livre : « Les lois naturelles de l’enfant » (2). Ce livre va répondre aux aspirations et aux questions d’un grand nombre puisqu’il s’est vendu à 220 000 exemplaires. Nous en avons présenté une mise en perspective sur ce blog (3). On lira ce nouvel ouvrage : « Une année pour changer » à l’éclairage du précédent, car il est entièrement centré sur l’expérience qu’il relate, cette fois une expérimentation à grande échelle.

« Dans le cadre de la lutte menée contre le redoublement et l’échec scolaire, Madame Martine Schyns, ministre de l’enseignement de la Fédération Wallonie Bruxelles, m’a sollicitée pour accompagner 750 enseignants volontaires, désireux de transformer leurs pratiques. En Belgique, 4 enfants sur 5 n’ont pas les compétences minimales en lecture à la sortie du CM2. L’accompagnement a pris la forme de 8 journées de rassemblement à Namur. L’objectif était de créer des environnements adaptés au fonctionnement et aux besoins de l’enfant en faisant davantage place aux grands invariants de l’apprentissage tels que l’autonomie, le sens, le challenge, la rencontre et la joie. De cette manière, nous avons pu soutenir le développement de ce que l’on appelle les fonctions exécutives, identifiées par la recherche comme centrales pour l’épanouissement humain » (p 13).

 

Les fondations de l’intelligence

 Ce que des chercheurs, amis de l’enfance, comme Maria Montessori, avaient découvert, il y a un siècle, des recherches en neurosciences le confirment aujourd’hui : l’extraordinaire potentiel du tout petit. Ici, Céline Alvarez s’appuie sur les travaux du « Center on the developing child » de l’Université Harvard. La question éducative se pose en ces termes : ne pas contrarier, ne pas freiner le développement et les apprentissages du tout petit, mais, au contraire, les faciliter et les encourager. « Lorsque l’enfant nait, tout est possible. Il est dépositaire de tous les potentiels humains. Ses circuits sont déjà là, préesquissés. Il est prédisposé à être et à faire tout ce que nous cherchons à lui inculquer : développer un langage élaboré, penser de manière complexe, agir de façon contrôlée, créer, etc, mais il n’est pas déterminé à le faire. Il nait avec ces potentiels, mais ce qui détermine leur développement ou non, c’est nous : notre capacité individuelle, familiale, sociale, institutionnelle , à fournir à l’enfant des environnements appropriés, pensés dans le rapport et le soutien de ses lois universelles de développement » (p 9).

De fait, au départ, il nous faut permettre à l’enfant, de réaliser, par lui-même, les activités de la vie quotidienne qui se présentent à lui. « Si le jeune enfant, dès sa première année de vie, peut s’engager dans des tâches qui mettent son intelligence au défi, le niveau de maitrise de ses compétences exécutives augmentera rapidement entre 3 et 5 ans. L’enfant sera de plus en plus capable de se contrôler, de différer une envie et d’attendre pour parler… il saura prendre du recul, analyser la situation avant d’agir. Il grandira en prenant confiance en lui, en ses capacités » (p 26).

Céline Alvarez met ainsi l’accent sur le développement des « fonctions exécutives » de l’enfant. « Les fonctions exécutives sont des compétences cognitives qui nous permettent d’agir de façon organisée pour atteindre nos objectifs. Elles regroupent trois compétences : la mémoire de travail (capacité de garder une information en mémoire sur un temps court), le contrôle inhibiteur (capacité à se contrôler, à se concentrer et à inhiber les distractions), la flexibilité cognitive (capacité à détecter ses erreurs, à les corriger, à persévérer et à se montrer créatif) (p 23). Ces compétences exécutives sont « les fondations biologiques » des apprentissages scolaires. « Sans ces comportements, les enfants ne peuvent apprendre ».

Alors, le développement des compétences exécutives a été au cœur de la transformation des pratiques pédagogiques engagée en Belgique. « Lors de l’accompagnement, les enseignants ont été invités à focaliser toute leur réflexion et leurs pratiques sur l’exercice des fonctions exécutives en renforçant les éléments favorables… et, en veillant dans la mesure du possible, à réduire les éléments entravant. Le fonctionnement des classes s’est ainsi peu à peu transformé : les enfants ont été accompagnés individuellement à devenir autonomes au quotidien, et, dans les classes, à choisir eux-mêmes des activités qui les motivent, parmi une sélection ambitieuse et pleine de sens soigneusement réalisée par l’adulte. Les enfants étaient aidés à les mener à leur terme seul ou en tout petit groupe de deux ou trois enfants, à patienter, à s’entraider, à s’exprimer clairement etc » (p 45).

 

Une année pour tout changer

Si l’accompagnement mis en ouvre par Céline Alvarez a été collectif, elle a également suivi l’évolution sur le terrain dans une relation privilégiée avec 3 enseignantes : Marie, dans une classe de CP ; Vania et Vanessa en deuxième année de maternelle. « Tout au long de l’année, Marie, Vania et Vanessa m’ont accueilli plusieurs journées dans leur classe. J’ai pu ainsi filmer leurs avancées et les retransmettre aux enseignants qui participaient à l’accompagnement au cours des huit journées de partage et de formation. Les séquences filmées dans les classes de Maria, Vania et Vanessa ont alors été au cœur des échanges (p 50). De même, dans le livre, en analysant les différentes étapes du processus, Céline Alvarez s’appuie sur la relation constante qu’elle a entretenue avec Marie, Vania et Vanessa. Elle se réfère à une expérience quotidienne au sein des classes en rapportant les faits significatifs et les expressions des participants. Ce suivi est illustré par de nombreuses photos. Très concrètement, nous sommes introduits au cœur de l’expérimentation.

Et nous voici engagés dans les étapes successives du processus où des priorités s’affichent : Relever le niveau des activités proposées parce que les enfants ont besoin d’aller plus loin ; optimiser l’espace parce que l’espace de la classe habituelle est insuffisant et mal organisé pour répondre au besoin de mobilité ; trier les activités en développant celles qui suscitent la joie des enfants…

Et, au fil des mois, il y a une tâche essentielle : « installer l’autonomie ». Tant individuelle que collective, l’autonomie requiert un apprentissage, mais celui-ci répond aux besoins profonds de l’enfant. Avec empathie et une grande compréhension de l’évolution de l’enfant, Céline Alvarez sait induire cette éducation. Celle-ci a des effets positifs plus généraux encore : « En s’efforçant à faire seuls et à respecter les règles de la classe (y compris l’ordre), continuellement toute la journée, les enfants Le processus traverse des phases différentes. Ainsi Céline Alvarez nous parle de la grâce des premiers jours. C’est la joie des enfants. « Un système rigide, étouffant venait d’être ôté. Ils pouvaient respirer, circuler, bouger, échanger, choisir eux-mêmes leurs activités, et créer un tout autre lien avec leurs enseignants totalement disponibles aux échanges individuels avec chacun d’entre eux « (p 123). Et les parents eux-mêmes constatent que leurs enfants aiment désormais aller à l’école.

Et puis, on s’est rendu compte qu’il fallait traiter en profondeur les vraies problématiques. « Après une première bouffée d’oxygène, l’atmosphère studieuse et apaisée laisse souvent la place au désordre » (p 131). Céline Alvarez nous parle du « désordre fécond des jours suivants ». Alors l’environnement doit se réajuster. Le vrai travail commence : apprendre aux enfants à être autonomes, à patienter, à persévérer, à tenir une conversation…

Dans ce contexte, l’entrée dans la lecture se fait naturellement dès la maternelle : reconnaissance des lettres et des digrammes (ch, ou, etc), association des sons correspondants, composition et reconnaissance des mots, écriture. « Lorsque les enfants lisent avec plus de fluidité, ils s’emparent spontanément des petits albums adaptés à leur âge » (p 226). Et, au CP, nous dit Marie, « j’ai vu des progrès phénoménaux chez la plupart de mes élèves. Ils lisaient des histoires dès le mois de décembre. Dans notre école, ce n’est pas du tout courant ».

 

Un changement en profondeur

En conclusion, Céline Alvarez rappelle les acquis de l’expérience réalisée à l’école maternelle de Gennevilliers en 2011-2014. « Le passage de l’état de « désordre » à une personnalité sereine, enthousiaste, épanouie, empathique, confiante, mature, semblait être une conséquence, inattendue mais directe, de l’exercice soutenue de la fonction cognitive… Je ne doutais pas que nous puissions, en Belgique, aider les enfants à entrer plus facilement dans les apprentissages scolaires, mais le développement de cette personnalité rayonnante était-il reproductible ? Ce fut la grande surprise de cet accompagnement. Il y a eu chez les enfants une vraie transformation. Ils étaient plus motivés, plus souriants, plus confiants et plus sereins » (p 225). Les témoignages l’expriment abondamment. Celui-ci, en provenance d’une directrice d’école communale est représentatif : « Dans les classes, il y a désormais une place de choix pour tous, que chaque enfant s’est autorisé à prendre sans craindre le regard de l’adulte ou de ses pairs. L’humain a repris sa place. Cette priorité acquise, le champ était libre pour l’épanouissement et des apprentissages de haut vol. Le témoignage des parents est venu confirmer notre ressenti tout au long de l’année. Ils voyaient, eux aussi, à travers ce grand chamboulement, des enfants s’apaiser, être fiers d’eux, devenir autonomes et avoir une soif insatiable d’apprendre » (p 236).

Ainsi, oui, un changement en profondeur est possible. Et, par rapport à nos attentes, c’est une vraie révolution. Cécile Alvarez ouvre un chemin : « Rassemblons nos forces et allons y. Il nous faudra alors changer radicalement de posture, déposer l’habit de l’enseignant et revêtir celui de « soignant », de « réparateur de l’esprit ». Nous ne visons plus en premier l’assimilation de concepts culturels. Nous visons d’abord la réhabilitation des fonctions cognitives supérieures, autrement appelées fonctions exécutives. Nous visons d’abord la créativité, la persévérance, la confiance et l’entraide. Nous visons, avant toute chose, l’épanouissement de la personne, de sa pleine singularité, de sa dignité. Le reste suivra » (p 239).

C’est une nouvelle vision où nous retrouvons des accents montessoriens. « L’âme humaine a ceci de remarquable qu’elle cherche le perfectionnement ardemment. Elle s’épuise, se fane dans la stagnation, le manque de sens, la médiocrité. Elle doit s’élever. Les enfants ressentent instantanément les adultes qui Alors une joie s’éveille. « Quand les enfants se réveillent jusqu’à ce qu’ils reviennent à eux-mêmes, alors la classe devient une symphonie aux tonalités différentes, puissantes, inspirantes. Les changements nous remplissent d’une joie et d’une satisfaction que l’on ne peut imaginer. Je peux essayer de vous la décrire. Je peux essayer de vous en parler. Mais, comme le dit un proverbe chinois : « J’entends et j’oublie. Je vois et je retiens. Je fais et je comprends. « Faites. Vivez-le. Jamais plus vous ne reviendrez en arrière » (p 340).

 

Un livre important

 Ce livre est important. Il montre que l’échec scolaire peut être efficacement combattu. Ce n’est pas un vœu pieux. Ici, c’est une démonstration par l’expérience. La réussite est là. Certes, on entend aujourd’hui des critiques malveillantes (4). Il y en eut déjà à propos de l’expérience de Gennevilliers. La personnalité enthousiaste de Céline Alvarez dérange. Son entreprise s’appuie sur des fondements scientifiques affirmés et des valeurs qui vont de pair. C’est aussi une pédagogie exigeante. Il y a donc des mentalités rétives. Les valeurs portées par cette expériences peuvent susciter des réserves. D’après des données sociologiques, on sait, par exemple, que la confiance interpersonnelle (5) est minoritaire dans la population adulte française. Rien n’est acquis. Mais cette expérience prouve que la réussite est possible là où la vision est active et la motivation présente. Quand on voit le courant de sympathie qui porte la transformation pédagogique engagée par Céline Alvarez, le grand succès de son livre : « Les lois naturelles de l’enfant », on peut se dire que cette transformation répond à une puissante aspiration. Il y a là un terrain favorable pour le développement de cette nouvelle approche éducative. Et nous avons tous à en apprendre…

Ce livre est important également sur un registre plus vaste. Ce livre, comme le précédent du même auteur, est un jalon dans le mouvement historique pour la reconnaissance de la personne enfantine. On sait, que la lumière reconnue par Jésus, chez le jeune enfant (6), a été longtemps méconnue par la suite. Au siècle dernier, des éducateurs se sont levés pour promouvoir le potentiel de l’enfant. Ainsi, dans ce livre, comme dans le précédent, on reconnaît l’état d’esprit qui a animé Maria Montessori qui voyait en l’enfant « un embryon spirituel » (7). C’est le même élan vital qui est reconnu ici.

Les neurosciences confirment aujourd’hui l’immense potentiel du petit enfant. Sur un autre registre, des recherches ont mis en évidence la dimension spirituelle du jeune enfant en terme d’une dynamique relationnelle (8). Dans un livre comme celui-ci, nous voyons se dessiner une conjonction entre science et spiritualité.

En conclusion, nous pouvons reprendre ici l’approche de Céline Alvarez dans son livre précédent : « les lois naturelles de l’enfant ». Céline Alvarez attache une grande importance à la « reliance », l’acte de relier ou de se relier, ou le résultat de cet acte. Lorsqu’une attitude généreuse, chaleureuse, empathique, se manifeste, elle a partout des effets bénéfiques. Et, notamment, elle permet l’expression des tendances empathiques et altruistes des enfants. « Le jeune enfant est un être d’amour… Les enfants sont fondamentalement mus par des élans altruistes, généreux » (p 396). Alors Céline Alvarez ose affirmer : « Le secret, c’est l’amour ». « L’amour n’est pas le premier mot qui vient à l’esprit lorsqu’on aborde le sujet de l’apprentissage et il s’agit là d’une erreur fondamentale. L’amour est le levier de l’âme humaine. Nous sommes câblés pour la rencontre chaleureuse et empathique avec l’autre, et, lorsque nous obéissons à cette grande loi dictée par notre intelligence, alors tout devient possible » (p 392).

Cet état d’esprit, vécu par Céline Alvarez, a participé à la mise en œuvre de l’approche pédagogique qui a entrainé un changement profond dans les écoles belges. Ainsi, comme elle nous le dit : « Le changement radical est possible, il est réel, à portée de la main. Mais il ne se fera pas sans effort. Une véritable révolution intérieure nous est nécessaire » (p 239).

Dans les ombres de notre temps, il y a aussi des évènements lumineux. En voici un.

J H

  1. Céline Alvarez. Une année pour tout changer et permettre à l’enfant de se révéler. Les Arènes, 2019. A l’occasion de cette parution, Céline a été interviewée plusieurs fois à propos de son livre . Ainsi : https://www.youtube.com/watch?v=bKLsOW4E274

https://www.youtube.com/watch?v=kIZcHEFYUG8

  1. Céline Alvarez. Les lois naturelles de l’enfant. Les Arènes, 2016
  2. «  Présentation du livre de Céline Alvarez : « Les lois naturelles de l’enfant ». Pour une éducation nouvelle, vague après vague » : https://vivreetesperer.com/pour-une-education-nouvelle-vague-apres-vague/
  3. En réponse à un article malveillant paru dans Libération, 335 enseignants belges ont immédiatement répondu pour soutenir Céline Alvarez : https://medium.com/@vniacaao/et-si-lon-écoutait-les-enseignants-qui-ont-travaillé-avec-céline-alvarez-334aeb4c0d65
  4. Des données sur l’état de la confiance interpersonnelle en France (p 53-62) dans :Yann Algan, Elisabeth Beasley, Daniel Cohen, Martial Foucault. Les origines du populisme. Seuil, 2019 Et : « Promouvoir la confiance dans une société de défiance » : https://vivreetesperer.com/promouvoir-la-confiance-dans-une-societe-de-defiance/
  5. « Le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent », déclare Jésus en parlant des jeunes enfants (Marc 10. 13-16)
  6. Dans son livre : «L’enfant », publié en 1935 et constamment réédité depuis lors, Maria Montessori nous communique sa vision du jeune enfant et de l’éducation qui en découle. A propos de Montessori  https://fr.wikipedia.org/wiki/Maria_Montessori
  7. « La vie spirituelle comme une conscience relationnelle : une recherche de David Hay » : https://www.temoins.com/la-vie-spirituelle-comme-une-l-conscience-relationnelle-r/ « L’enfant, un être spirituel » (D’après le livre de Rebecca Nye. Children’spirituality. What it is and why it matters ? 2009) : https://vivreetesperer.com/lenfant-un-etre-spirituel/

Voir aussi

« Et si nous éduquions nos enfants à la joie ? Pour un printemps de l’éducation ! » : https://vivreetesperer.com/et-si-nous-eduquions-nos-enfants-a-la-joie-pour-un-printemps-de-leducation/

 

Une approche spirituelle de l’écologie

Selon Christine Kristof-Lardet

Manifestement, la transition écologique implique une transformation profonde dans notre genre de vie et, en conséquence, dans nos mentalités. Ce changement, intervenant dans des habitudes séculaires, ne va pas de soi. Il peut entrainer un ressenti de perte et un bouleversement des repères. Le coût est élevé. Face à ce coût, nous avons besoin d’une force motrice qui induise une nouvelle manière de voir, mais aussi de sentir, si bien que les comportements émergents puissent être assortis de satisfactions nouvelles. Par exemple, la « sobriété heureuse » ne peut l’être que si l’on y trouve des satisfactions morales, psychologiques et matérielles permettant de quitter la posture de consommateur traditionnel. La transition écologique implique des transformations sociales et économiques. Elle requiert en conséquence une vision éclairant ces transformations.

Aujourd’hui, à partir même des changements en cours, nous commençons à comprendre que tout se tient et à voir le vivant et le monde dans leurs interrelations, dans une approche globale, dans une perspective holistique. L’ampleur du changement requis requiert un dépassement. On rencontre ici une approche spirituelle si tant est qu’on puisse la définir, avec David Hay (1), comme « une conscience relationnelle » dans une relation avec les autres et avec soi-même, avec la nature, avec la présence divine… Et, de plus, en se référant à un chercheur anglais, Alister Hardy, le même David Hay perçoit le potentiel spirituel de l’homme comme une faculté qui s’inscrit dans l’évolution des êtres vivants. Si, la transition écologique nous achemine vers une civilisation nouvelle, ce processus requiert une vision spirituelle qui puisse éclairer les acteurs. Cette vision est déjà en cours. Elle est exprimée par des théologiens et par des sages (2). Elle inspire des pratiques nouvelles. On assiste à des émergences et à des convergences. Nous avons besoin de reconnaître ce mouvement et d’en percevoir toutes les dimensions. Comment mobilise-t-il déjà de nombreuses ressources en terme d’initiatives et de communautés ?         A ce stade, le récent livre de Christine Kristof-Lardet : « Sur la Terre comme au Ciel » (3), est une contribution particulièrement importante puisqu’elle nous fait connaître « les lieux spirituels engagés en écologie ». « Nombre de communautés spirituelles intègrent aujourd’hui la dimension écologique dans leur mode de vie et leurs structures, puisant à la source de leur sagesse les raisons de leur engagement pour la terre et le vivant. En même temps, elles sont des laboratoires où s’inventent et s’expriment des « possibles » qui peuvent nourrir notre société en quête de sens, de valeurs et de repères. Cette ouverture favorise l’émergence d’une approche spirituelle de l’écologie au sein de laquelle les postures du « méditant » et du « militant » se fécondent mutuellement » (page de couverture).

 

Approche spirituelle de l’écologie

Christinde Kristof-Lardet nous présente ainsi « une approche spirituelle de l’écologie ». C’est la poursuite d’un cheminement que Christine accomplit depuis une vingtaine d’années. « Ecojournaliste, écrivain, voyageur, militante écologiste à les heures, j’ai vu, pleuré et défendu la beauté de la Terre. Je me suis parfois posée dans des monastères retirés du monde et me suis laissé questionner. Comment, devant tant de splendeur, ne pas avoir le cœur chaviré ? Comment trouver la paix intérieure au sein du chaos que mes reportages me donnaient à voir ? Comment concilier ma quête écologique et ma quête spirituelle ? c’est lors d’une grande rencontre organisée au centre bouddhiste Karma Ling en Savoie que la jonction s’est opérée et que j’ai compris qu’écologie et spiritualité n’étaient en fait qu’une seule et même réalité. Cette prise de conscience a signé le début de mon exploration » (p 9). Dans une inspiration chrétienne et dans une dimension interreligieuse, Christine Kristof Lardet a donc suivi cette voie, la voie d’une convergence entre écologie et spiritualité. Journaliste, spécialiste des questions écologiques, elle est aujourd’hui rédactrice en chef de la revue Présence (4). Dans la continuité d’un travail jadis engagé par le WWF en direction des spiritualités, elle a poursuivi cette tâche en créant avec d’autres personnes de diverses traditions, un « Réseau des écosites sacrés ». « La vocation de ce réseau est de mettre en lumière les initiations écologiques inspirantes au sein des centres spirituels et de favoriser le dialogue entre ces lieux ».

Il s’agit bien de mettre en évidence la montée d’une approche spirituelle de l’écologie. « S’interroger sur les causes profondes de la destruction de la nature et de la crise écologique conduit à comprendre que celles-ci s’enracinent en grande partie dans notre cœur, notre culture et notre façon de « penser le monde ». C’est donc là, dans notre esprit et notre cœur que nous devons aussi chercher les solutions. La perspective de l’effondrement ne relèvent pas de la crise à résoudre ; elle nous appelle à une transformation intérieure qui seule permettra une véritable mutation de notre société… Il nous faut accomplir « un saut quantique » de la conscience. Pour cela, il convient de sortir de la séparation – perçue ou vécue comme telle – entre le monde de l’écologie et celui de la spiritualité. Développer une approche spirituelle de l’écologie, au sein  de laquelle la posture du « méditant » vient nourrir celle du « militant » – et inversement – ouvre des perspectives de réconciliation et d’espérance » (p 11).

 

Un réseau d’écosites sacrés

Nous découvrons à travers ce livre de nombreuses communautés qui s’inscrivent dans des cheminements religieux différents, du christianisme, aux religions orientales et aussi à des spiritualités émergentes et qui, chacune, s’ouvrent à la conscience écologique. On pourrait dire que, d’une certaine manière, leurs pratiques spirituelles les prédisposent à un éveil écologique, mais que c’est justement cet éveil qui engendre une dynamique commune. « L’écologie se pose de façon transversale au cœur des traditions spirituelles et inspire chacun de nous, « habitants de la maison commune », croyants et non croyants confondus : « Nous avons besoin d’une conversion qui nous unisse tous parce que le défi environnemental que nous vivons, et ses racines humaines, nous concernent et nous touchent tous », écrit le pape François dans l’encyclique « Laudato si’ » consacrée à l’écologie. Découvrir quelles sont les visions et les ressources cultivées au sein des centres spirituels, les mettre en lumière et montrer leur pertinence est un des buts de cet ouvrage » (p 11-12). Quelque soient les manques et les dysfonctionnements éventuels, ces communautés participent à une évolution générale. Elles innovent. « Toutes ces communautés, aussi imparfaites soient-elles, peuvent être également vues comme des laboratoires ou s’expérimente en miniature et de manière concentrée tout ce que notre humanité traverse à une plus grande échelle. Ce qui se joue dans notre société, notamment la transition écologique, se joue également en microcosme au sein des centres spirituels. Dans ce sens, il n’est peut-être pas vain d’imaginer que tous les trésors d’amour, de courage et de perspicacité mis en œuvre par ces communautés puissent être profitables au plus grand nombre » (p 12-13).

Ainsi, l’auteure nous introduit ici dans la vie d’une trentaine de communautés à travers « des reportages, réalisés en plusieurs années et actualisés en permanence, pensés dans une perspective de découverte et de partage et témoignages vécus »… Notre posture de base s’inscrit dans une neutralité bienveillante et lucide ». Le lecteur que nous sommes, trouve que cet objectif a été bien rempli. Chaque communauté est l’objet d’une monographie qui nous permet de la situer dans son histoire et d’en découvrir la vie quotidienne dans ses différents aspects. En 200 pages, il y a là un ensemble d’études de cas particulièrement éclairantes.

Nous voici en voyage : Des communautés chrétiennes anciennes ou nouvelles, des communautés de tradition orientale, des « communautés spirituelles intentionnelles »…

 

Quelques exemples en empruntant un tout petit bout de descriptif :

Le Centre Amma de Pontgoin 

« Le Centre Amma de Pontgoin, teinté d’Orient et d’Occident, est tout d’abord un lieu pour vivre les enseignements d’Amma… la sainte indienne qui serre les foules dans ses bras. Il s’inscrit dans la lignée des ashrams indiens par sa philosophie, les rituels et la discipline qui y est pratiquée. En même temps, cet ashram est un écosite qui expérimente et promeut un vivre-ensemble écologique en harmonie avec la nature… Au Centre Amma où l’on s’exerce aussi bien à la méditation, qu’à la permaculture, à la gouvernance partagée ou à l’art du compostage, la pratique spirituelle et l’engagement écologique se nourrissent mutuellement » ( p 21).

 

L’Arche de Saint-Antoine

« Dans cette ancienne abbaye, lovée au pied du Vercors, s’expérimente, depuis une trentaine d’années, une vie profonde de fraternité et de partage dans l’esprit de Lanza del Vasto, un disciple chrétien de Gandhi, à mi-chemin entre la vie monastique et la vie laïque. Cette communauté se compose aujourd’hui d’une cinquantaine de personnes qui expérimentent un mode de vie simple fondé sur la non-violence et la spiritualité, et sous-tendu par la recherche d’une harmonie avec soi, les autres et la nature. Ces valeurs constituent la trame d’une écologie intégrale qui se décline dans tous les aspects de la vie » (p 39).

 

Le Village des Pruniers

Fondé au cœur de la Dordogne par le vénérable moine, Thich Nhat Han en 1982, ce centre spirituel incarne le rêve de son fondateur de développer, dans un lieu de nature préservé et nourrissant, une communauté conjuguant la pratique de la pleine conscience et le vivre-ensemble fraternel… Puisant aux fondements de la tradition bouddhiste zen, cette communauté internationale propose aux multiples retraitants d’expérimenter la pratique de la méditation dans ses différentes formes et de vivre un chemin de réconciliation avec soi, avec les autres et avec la Terre » (p 59).

 

L’écohameau de La Chaux en Côte d’or

« Loin du tout-conformisme comme du tout-confort, Marie et Alexande Sokolovtch posent leur sac en juin 2009 à la ferme de La Chaux en Bourgogne après des années de nomadisme alternatif au service de jeunes démunis. Leur désir : prendre le temps, à la suite de Jésus, de vivre une simplicité volontaire et évangélique dans la cohérence entre engagement social, écologique et spirituel… Les Evangiles, c’est notre base et notre nourriture… Aujourd’hui, trois familles sont installées à La Chaux et forment avec sept enfants et un célibataire, une communauté d’une quinzaine d’habitants fixes. Inspirée des communautés de l’Arche de Lanza del Vasto, le ferme de La Chaux est aujourd’hui un bastion de la sobriété et de la débrouille, mais aussi un lieu où s’expérimente de façon atypique, le partage, l’accueil inconditionnel du prochain et la relation à la terre. Par son mode de vie et sa pratique, la ferme de La Chaux explore les différentes dimensions de l’écologie : la sobriété, l’usage du troc, la relation à la terre avec la réalisation de zones de maraichages ouvertes à tous et des cultures de variétés anciennes de blé en agroforesterie… , le partage et le don » (p 139-140)

 

Le monastère de Taulignan

« Onze sœurs vivent aujourd’hui dans ce monastère perdu au milieu de la Drome provençale. Elles cultivent des plantes aromatiques servant à créer des huiles essentielles ou des hydrolats dans la distillerie qu’elles ont fait construire en 2014. Cette activité est née de la nécessité de trouver une activité pouvant assurer leur subsistance en accord avec la vie monastique. C’est un parcours écologique qui a été encouragé par le paysan philosophe Pierre Rabbi. Au cœur de leur vie communautaire et de prière, ces pionnières cherchent à explorer entre Terre et Ciel la ligne de crête entre foi et écologie » (p 105).

 

Le monastère Orthodoxe de Solan dans le Gard

« Le monastère de Solan abrite aujourd’hui 17 moniales de tradition orthodoxe qui vivent principalement de la production de vin et des produits de leurs récoltes au potager ou au verger » . « La rencontre avec l’agroécologiste Pierre Rabbi dans les années 1990 a été décisive ». Elles ont accompli un beau parcours écologique. « Aujourd’hui, elles mettent en pratique ces principes écologiques d’autant plus naturellement qu’elles les vivent aussi de l’intérieur par la prière… la liturgie… une ascèse et l’eucharistie partagée dans une conscience ouverte au cosmos ». « Dans notre tradition, nous n’avons pas la dichotomie habituelle entre le spirituel et le matériel, le Créateur et la Création, entre l’homme et la nature… Nous nous sentons vraiment faire partie de la Création… » (p 136-131)

 

L’écovillage de Findhorn en Ecosse

« Le rôle de Findhorn depuis sa création a été de démontrer l’expérience pratique de la communion et de la coopération avec la nature fondée sur une vision de la vie et de l’intelligence organisée qui lui est inhérente » ( David Spangler). Au départ, en 1962 ,dans le nord de l’Ecosse, « c’est un groupe de trois adultes et six enfants, poussés par le « destin », qui s’installe sur un terrain de caravaning et qui développe une vie en harmonie avec le divin et la nature. Aujourd’hui, c’est une communauté composée d’environ 600 personnes qui propose un modèle de vie cohérente fondée sur trois principes : la spiritualité (par l’écoute intérieure), le service à autrui (par l’amour en action), et l’écologie globale (par l’intelligence au cœur de la nature) »… « La communauté de Findhorn s’illustre pas sa longévité et son développement exceptionnel… Elle a su conjuguer la spiritualité, la relation à la nature et le service au monde. Ces bases solides ont permis l’émergence de nouveaux paradigmes et de chemins jusque là inexplorés, en particulier la coopération avec l’intelligence de la nature… Dans ce creuset, s’est développée non seulement une conscience forte de l’unité de toutes choses, mais aussi la nécessité d’inscrire notre humanité dans le cercle beaucoup plus vaste de la communauté du vivant, avec laquelle nous partageons une fraternité ontologique » (p 177 et 198).

A travers ces quelques exemples, une grande émergence apparait et des convergences sensibles se manifestent.

A partir de cette recherche, Christine Kristof-Lardet met en évidence un dynamique spirituelle, communautaire, écologique. « Dépositaires de sagesse, ces communautés peuvent contribuer à soutenir et à nourrir l’évolution du monde, sa conversion vers un authentique respect de la planète et de tous les êtres qui l’habitent. Ce n’est que dans une approche globale, écosystémique, transdisciplinaire que nous pouvons répondre aux défis de notre temps » (p 235-236).

Ce livre bien écrit, bien construit rend compte au plus près de la démarche des communautés où la spiritualité et l’écologie s’allient. Il tient bien l’objectif annoncé : être « une ressource qui peut inspirer chacun dans sa quête d’harmonie et ouvrir des perspectives pertinentes pour notre monde en transition » .Comme l’écrit Sabish Kumar : « La transition nous appelle à passer à une vision holistique du monde, où physique et métaphysique, engagement et spiritualité dansent ensemble comme les deux faces d’une même médaille : Transition extérieure et transition intérieure vont de pair » (p 9)

J H

  1. David Hay. La vie spirituelle comme une conscience relationnelle. La recherche de David Hay sur la spiritualité d’aujourd’hui (« Something there. The biology of the human spirit ») : https://www.temoins.com/la-vie-spirituelle-comme-une-l-conscience-relationnelle-r/
  2. Une vision exprimée par des théologiens et des sages. Ce livre comprend une bibliographie étendue (p 267-273) ; L’auteure note l’influence des spiritualités bouddhiste, hindouistes et plus largement orientales . « Ces spiritualités qui, pour la plupart s’ancrent dans une approche écosystémique et holistique, ont permis d’élargir les perspectives de nos cultures souvent cartésiennes, réductionnistes et largement anthropocentriques… Les résonnances étonnantes entre les textes récents du dalaï-lama autour de la responsabilité universelle par exemple et ceux du pape François dans l’encyclique « Laudato si’» sur l’écologie intégrale, révèlent une complémentarité de points de vue » (p 81), Dans le champ de la théologie chrétienne, Jürgen Moltmann a accompli un travail pionnier puisque son livre : « Dieu dans la création » et avec pour sous-titre : « Traité écologique de la création » est paru au Cerf en 1988. Courte présentation : https://lire-moltmann.com/dieu-dans-la-creation/ La pensée théologique de Jürgen Moltmann est très présente sur ce blog : « Convergences écologiques : Jean Bastaire, Jürgen Moltmann, pape François, Edgar Morin » : https://vivreetesperer.com/convergences-ecologiques-jean-bastaire-jurgen-moltmann-pape-francois-et-edgar-morin/ Nous mettons également en évidence le courant écologique outre-Atlantique inspiré par le théologien : Thomas Berry : « Comment entendre les principes de la vie cosmique pour entrer en harmonie » : https://vivreetesperer.com/comment-entendre-les-principes-de-la-vie-cosmique-pour-entrer-en-harmonie/ Dans son « Center for action and contemplation », Richard Rohr développe également une spiritualité écologique. Nous avons rapporté certains de ses thèmes : « L’homme, la nature et Dieu » : https://vivreetesperer.com/lhomme-la-nature-et-dieu/
  3. Christine Kristof-Lardet. Sur la Terre comme au Ciel. Lieux spirituels engagés en écologie. Labor et Fides, 2019
  4. Présence. La revue des chercheurs de sens : https://revuepresence-leblog.com

Animer une émission de radio

« Paroles d’écriture » de Michel Bernard

 Michel Bernard, anime une émission culturelle dans une radio locale: « Paroles d’écriture » sur la radio:  « Agora Cote d’azur »

Nous lui avons posé quelques questions.

  1. En quoi consiste cette émission: « Paroles d’écriture »? Quelle est en est la finalité?

Cette émission, que j’ai conçue en 2011, et qui a été acceptée immédiatement par Agora Côte d’Azur, est centrée sur les livres et leur auteur. Je dirai, pour être précis, d’abord sur l’auteur, et ensuite sur le livre. La finalité est de donner le désir de lire et de découvrir des auteurs. Je pense qu’au delà le livre, il y a un être humain qui, mieux connu, provoquera le désir de lire ce qu’il écrit.

 

  1. Tu as créé cette émission en 2011. Dans quel contexte as-tu rencontré cette radio?

Alors, je prends conscience de l’importance de vulgariser, au sens le plus noble du terme, de sensibiliser, le plus de gens possible à la lecture et à l’écriture. Ma référence, qui reste toujours inscrite dans tous les documents, reste la suivante : c’est une phrase de Louis Lavelle (1883-1951) : « La corruption de la parole et de l’écriture est la marque de toutes les autres corruptions. »

Face à cette citation, je réponds : « La renaissance de la parole et de l’écriture est le témoignage de toutes les autres renaissances « 

Dans cet esprit, une émission radio est un  média de qualité. Dont l’influence est beaucoup plus grande que nous le pensons. Ainsi, outre les auditeurs régionaux de l’émission, elle est ensuite mise sur mon site, et entendue dans le monde entier par environ 60 000 personnes.

 

  1. Quel a été ton parcours de vie? Dans quelle mesure ce parcours t’a préparé à réaliser cette émission?

Un parcours de vie, unique certes, comme chaque parcours de vie. Après l’école primaire, mon père refusant la poursuite de mes études, j’entre en pharmacie et passe mon CAP et mon Brevet Professionnel de préparateur en Pharmacie (équivalent à un B.T.S). Puis après plus de 10 ans de travail, je reprends mes études par correspondance, grâce au C.N.T.E (Centre National de Télé-Enseignement, devenu le C.N.E.D, Centre National d’Enseignement à Distance), pour préparer l’examen d’entrée à l’université. Je réussis. Alors tout en travaillant, je fais des études universitaires dans plusieurs disciplines, puis le doctorat troisième cycle, et le doctorat d’état. Je travaille successivement, comme chargé d’études, puis conseillé professionnel au ministère du travail. Puis directeur adjoint à l’ANPE ( Association Nationale pour l’Emploi), qui se créait alors. Et Bertrand SCHWARTZ me demande de travailler avec lui sur un projet que tout le monde semble avoir oublié : les A.U.R.E.F.A : Association Universitaire Régionale d’Education et de Formation d’Adultes. Mais après 68, ce projet est annulé. Alors j’entre comme maître de conférence associé à l’IUT de Nantes pour créer un département. Ensuite, je deviens professeur et créais 5 DESS (Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées). Le dernier, sur la distance, sera créé à Paris II, où je suis affecté. Si alors, j’avais accepté de résider à Paris, ma carrière aurait encore évolué. Mais les évènements de la vie me conduisent vers d’autres décisions. Ce passage par une activité professionnelle avant de devenir universitaire, ainsi que la culture de l’artisan, transmise  par mon père, m’ont profondément marqué.

Alors, plus que l’université, j’envisageais l’aménagement du territoire ou le journalisme. Ainsi je peux dire que la conception et la réalisation de cette émission ont mis en valeur des compétences et des valeurs en sommeil.

 

Comment se réalise le choix des sujets et des personnes interviewées?

Je dispose d’une totale liberté pour le choix des auteurs et des livres. Ainsi, par exemple, j’accueille Edgar Morin, Boris Cyrulnik, Bertrand Vergely, ou des auteurs moins connus, mais de grande qualité, selon moi. A cela j’ajouterai que depuis 2018/2019, je prends un thème annuel. En 2018-2019 : Ce monde où va-t-il? En 2019-2020 : Explorer notre quotidien.

 

Au fil des années, quelles lignes de force émergent de ce travail?

Je retiendrai plus précisément les trois lignes force suivantes:

1 – La qualité et la disponibilité des personnes que je sollicite. Il en résulte des liens étroits.

2 – De la part des auditeurs, découverte, surprise et encouragement.

3 – Pour moi, un nouvel apprentissage et au sens concret du terme : Vivre le Nouvel Esprit Educatif (titre de l’un de mes livres).

 

Peux-tu rapporter quelques rencontres qui ont été marquantes pour toi?

Chaque rencontre est singulière et marquante. Mais je retiendrai peut être, outre les auteurs par ailleurs très connus : Geneviève Callerot (centenaire), Danièle Baudot-Laksine, la plus grande écrivaine du pays de Grasse et morte prématurément, Stéphane Udovitch , pianiste remarquable, Zarina Khan, une femme au parcours international, ou encore l’entretien avec ma fille Ana Paola.

 

Comment  cette ressource est-elle mise en valeur? Quel est le rôle du site dédié: « Arts Culture, Education tout au long de la vie »?

Cette émission est mise en valeur par une radio locale de grande qualité, Agora Côte d’Azur, puis sur mon site www.artscultureseducation.fr  A cela s’ajoute maintenant, directement sur mon site, quatre autres séries d’émissions. Un projet devrait voir le jour à la rentrée : 9 penseurs oubliés du 20ème siècle à connaître pour le 21ème siècle. J’étudie aussi actuellement la possibilité de contribuer à une banque  d’émissions radio pour l’Afrique.

Enfin, mon site ne comporte pas que ces émissions, il comporte également plusieurs rubriques, dont une récente : « Les Nouveaux Colibris ». Il s’agit de brèves notes de lecture, intégrant parfois, une émission radio. Il y aura 50 notes à la fin 2019 et 100 à la fin 2020.

 

Comment l’audience a-t-elle évolué?  Quelles relations?

L’audience évolue surtout de bouche-à-oreille car aucune autre publicité n’est faite par ailleurs. Et j’essaie le plus possible, par l’intermédiaire d’un mail, d’entrer en contact avec les auditeurs.

 

Michel, je te remercie de cet entretien et de ces réponses spontanées, as-tu quelque chose à rajouter? 

Oui Jean, Je veux d’abord rendre hommage, à tout ce que tu fais, à ton site, « vivre et espérer », à la qualité de tes notes de lecture. Toi comme moi, continuons d’agir en retrait de notre profession antérieure, mais avec le soucis constant de donner, d’offrir, de créer, jusqu’à notre dernier souffle.

C’est dans cette perspective que j’ai créé en septembre 2018 le collège international de sénior. Harmattan (site : cis-h.org).

Merci Michel. C’est une amitié réciproque. Ton nouveau site est véritablement un centre de ressources à l’oral bien sûr à travers le lien avec les émissions, et aussi à l’écrit. C’est une belle ouverture culturelle. Nous nous rejoignons dans un désir de compréhension et de partage

J H